Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

01/03/2017

Fonds, subventions..

subventions,manifestations anticorruption,roumanie

(Photo- Place de la Victoire, Bucarest, février 2017)

Un quotidien français titrait dimanche à la une de sa rubrique Europe: Roumanie. Des manifestants  forment le drapeau de l’UE à Bucarest. Plus loin: « Un Etat très corrompu. Selon Transparency International, la Roumanie fait partie des Etats les plus corrompus. Son système judiciaire a été mis sous surveillance spéciale par Bruxelles ». Le journal Le Monde consacre son éditorial à "cette révolte-là qui refuse de s'éteindre": L'Europe doit entendre la révolte roumaine. "La lutte contre la corruption cristallise les aspirations d'une société civile qui accède à un meilleur niveau de vie et d'éducation. La réalité d'un pouvoir confisqué par des élites s'enrichissant aux dépens de la population n'est plus supportable. Internet et les réseaux sociaux jouent un rôle crucial dans ce combat, en multipliant l'effet mobilisateur des initiatives civiques".

Cela fait un mois qu’une partie de la Roumanie (pas plus d'un tiers, que j’appellerais le tiers évolué) descend dans la rue, Place de la Victoire à Bucarest, et dans plusieurs grandes villes. L’autre Roumanie, celle qui ne fait pas partie « du tiers évolué » mais qui est majoritaire, manifeste pour soutenir le gouvernement ("le Parti a remporté les élections démocratiquement, laissons-le gouverner.."). Le Parti en question (social-démocrate..) leur a confectionné et distribué des pancartes semblables, en lettres rouges, et les slogans qui vont avec - on se croirait à un meeting de l’époque de Ceausescu, exactement pareil. Les personnages politiques qui se trouvent sur l'estrade portent tous des parkas rouges. Quelques personnes plus âgées se bousculent pour toucher et baiser la main de la ministre des Fonds européens, qui s’époumone dans un ahurissant exercice de démagogie néo-communiste. Elle possède, par ailleurs, une grosse fortune inexplicable…(elle habite une villa sur plus de 600m2, et a offert à son fils d'une vingtaine d'années une BMW à 240.000 E). « Peut-être que, si elle est déjà aussi riche, elle ne va plus voler », me dit une amie. Rien n’est moins sûr…Voici une anecdote à ce propos. Un député bulgare invite chez lui un député roumain. Celui-ci, ébloui par le domaine, la villa luxueuse de son collègue lui demande comment il est arrivé à faire tout cela. Le député bulgare lui répond : "ça, c’est le Fonds international pour le développement". L’année suivante, le député bulgare rend visite à son collègue roumain, il voit un domaine encore plus grand que le sien, une villa encore plus luxueuse, trois bolides dans le garage: "ça, c’est l’Europe", répond le Roumain. 

On est ici dans une configuration de corruption identique à celle d’un Etat africain, d’une république africaine, pour être précis: des dirigeants qui sont motivés exclusivement par leurs intérêts personnels, et qui s’ingénient à détourner et à siphonner l’argent public, les divers fonds et subventions via des programmes, des projets et des montages financiers. Mathématiquement, cela donne un Etat faible: pas d’infrastructure renouvelée et entretenue, pas de système médical cohérent et décent, pas de compétences professionnelles réelles, pas d’éducation efficace, etc. C’est pourquoi, la corruption tue effectivement: à long terme, à moyen terme, à court terme. Ici, il n’est pas question d’une quelconque idéologie, mais de corruption à l’état pur: historique, traditionnelle, culturelle. Comme celle à laquelle faisait référence la Reine Marie de Roumanie en 1917: « Nous avons une meute d’oligarques en politique dont le seul idéal est de faire tomber l’autre, de voler l’autre. Je suis dégoûtée, écoeurée, mais je n’ai pas où aller.» (Journal de guerre)   

Il est également possible de tirer bénéfice de l’idéologie qui a cours, ce que l’on voit dans d’autres contextes « caractérisés ». Je pense à une catégorie d'exemples qui me parle plus que d’autres. Ces derniers jours, la presse française a informé de l’ouverture d’une enquête financière visant la famille du jeune homme noir qui avait subi une interpellation brutale le 2 février, en Seine-Saint-Denis. « L’affaire, qui a débouché sur la mise en examen d’un policier, a déclenché des violences urbaines et a eu un grand retentissement politique ». Cette enquête fiscale concerne une subvention d’Etat à une association de quartier censée lutter contre les violences dans le département. C’est « une affaire qui embarrasse les autorités », « l’association aurait reçu, entre janvier 2014 et juin 2016, 678.000 E de subvention d’Etat par le biais de contrats d’accompagnement à l’emploi », « les investigations des policiers (…) auraient montré que huit membres de la famille L., tous habitant à Aulney-sous-Bois, ont perçu de l’association plus de 170.000 E de rémunération par virement, et 80.000 E ont été retirés en espèces », « les enquêteurs cherchent à savoir s’il s’agit d’un véritable système familial d’escroquerie aux aides d’Etat ou d’une mauvaise gestion ». Entre la neutralité de l’information et les euphémismes de rigueur, on est libre de se faire sa propre idée, quand même. Surtout quand on connaît les réalités, de près ou de loin. Il existe aussi les célèbres associations/centres dont le but serait la déradicalisation des jeunes qui basculent dans l’islam radical, et qui reçoivent d'importantes subventions d'Etat. Pour moi, c’est une théorie fumeuse, mais je ne suis pas spécialiste. Elle est portée par une anthropologue qui a des origines algériennes, marocaines, corses, françaises - nous informe Wikipédia-, et qui est la voix qui fait autorité (vraisemblablement la seule depuis Claude Lévi-Strauss..). 

Souvent, la pression d'ordre idéologique, dans une société dite libre, est encore plus insupportable, car elle agit comme un carcan qui vous étouffe, avec votre accord. Ce n'est pas parce que je n'ai jamais obtenu le moindre soutien à mon projet (ce dont témoigne ce blog), que je retiens toujours les exemples de détournements, de malversations, de fraude concernant les subventions. Non, c'est par un esprit de révolte juste. Cela concerne également la myriade d'agences et d'organismes européens dont il est difficile de comprendre l'utilité, et qui sont financés à hauteur de millions d'euros..Je suis souvent dégoûtée et écoeurée, pour reprendre les mots de la Reine Marie, par les nombreux exemples qui sortent quotidiennement, un peu partout.. Mais simplement, je ne connais que ces deux pays, par une assez longue expérience directe. En Roumanie, je n'ai jamais fait partie des réseaux, en France, je n'appartiens pas à une minorité ethnique.   

13/02/2017

Protestations historiques

Carmen Lopez 17 hrs 

Plus de 70.000 personnes en ce moment, et il fait très froid. Ils ont réalisé un drapeau aussi, la créativité et la communication sont impressionnantes.
 
Image may contain: one or more people, crowd, outdoor and text
 
La presse internationale en parle, et des images sont diffusées par tous les médias. Il y a, dans ce mouvement de contestation inespéré en Roumanie depuis 1989, une dimension internationale très actuelle: sanctionner la corruption de la classe politique, réclamer un vrai Etat de droit et des valeurs. Parmi les très nombreuses réactions rencontrées ces derniers jours dans la presse et sur les réseaux sociaux, j'en ai retenu et résumé deux. 
 
(ILD) L’estimation quantitative est évidente, regardons un peu la qualité. C’est la plus grande protestation de l’histoire de la Roumanie. (…) Supposons que, du jour au lendemain, tous les protestataires et leurs soutiens disparaissent. Imaginons une Roumanie sans eux. Une Roumanie dont la population soit réduite à ceux qui soutiennent l’actuel gouvernement [PSD, l’ancien PCR]. Cela se traduirait ainsi : un déficit de capital humain et social, d’expertise technique, de capacité de gestion, de niveau d’éducation, de capital relationnel, de productivité, de capacité de travail ; un déficit de civilisation et de contribution à la transmission informelle des normes de coexistence civilisée ; un déficit dans la culture citoyenne, dans les standards de la vie publique et politique, et dans les équilibres entre le système de pouvoir et la société. Sans ces protestataires, la Roumanie, qui se situe déjà à la dernière place dans l’UE, tomberait au-dessous des anciennes républiques soviétiques, au niveau africain probablement. Nous pouvons aussi imaginer l’inverse : de quoi aurait l’air un pays habité par le type humain et les groupes sociaux présents aux protestations. Simplement, il serait au niveau d’un pays de l’OCDE, vraisemblablement en top de liste quant aux indicateurs économiques, sociaux et de gouvernance..
 
(ILD) L’Académie roumaine vient de ressortir un vieux chantage classique, à savoir le discours nationaliste et patriotard. L’idée est simplissime : lorsque les corrompus, les irresponsables et les incompétents qui dirigent le pays le mènent vers le désastre économique, social, politique, culturel, en générant finalement une situation de conflit social, alors, à ce moment-là, brusquement, quelque chose apparaît. C’est "la menace extérieure", "la perte de l’unité nationale", "le démembrement territorial".. Le chantage se résume ainsi : vous vous sentez peut-être mal gouvernés, humiliés, volés, insultés, mais, attention, nous sommes tous des Roumains, nous devons garder notre intégrité nationale. Laissez donc la classe dirigeante diriger, car elle défend l’Unité du pays. Et si vous ne comprenez pas, c’est que vous n’êtes pas de vrais Roumains…Ce n’est pas du patriotisme, Messieurs les académiciens, c’est un acte de trahison..

02/11/2016

Le déni

déni,roumanie,compétences,corruption(Mes photos- Greenville, SC, 2016)

L’inquiétant problème de la Roumanie est le manque de compétences réelles, dont on commence à s’apercevoir. Mais ce n’est que l’un des effets secondaires à long terme de la corruption politique qui a gangrené le tissu économique et social. Vous me direz que d’autres exemples peuvent être vite trouvés, et pas des moindres. Oui, sauf que les démocraties que l’on s’empresserait de citer ont ces quelques kilos en plus qui leur permettent de mieux résister en cas de maladie.. Autrement dit, une longueur d’avance qui les protège du pire. La Roumanie constate non seulement que ses compétences commencent à devenir rares, mais aussi que le pays se vide à une vitesse inimaginable. Que voulez-vous faire dans un pays où le train relie deux villes à une distance de 424 km en 14 heures ? C’est plus qu’un vol transatlantique long courrier. Bientôt, les politiques resteront entre eux, fiers possesseurs de biens et de comptes, mais aussi de deux Masters et d'une Thèse -plagiat obtenus en un temps record: deux ans. Les associations qui, en jouant la séduction et la carte de l’identité nationale, comme RePatriot, essayent de flatter la diaspora, participent d’une propagande désespérée. J’ai trouvé sur le net ce bref article qui parle du déni dans lequel s’obstine la Roumanie ("Les Roumains-le peuple malade du déni. La vérité nous fâche!") et dont j'ai donné une version plus loin. 

Lire la suite

18/10/2016

Les chaussures

chausssures,distribution,marques,businessOn en trouve à des prix de plus en plus abordables.. Normalement, ce terme convient au produit qui se caractérise par un bon rapport qualité/prix. Néanmoins, si vous souhaitez acheter des chaussures à 25 Euros, ce sera à vos risques et périls. Les marques de distribution (même les grandes, jadis honorables) savent bien que le consommateur a appris, entre temps, que ce qui est bon marché ne peut aucunement être un gage de qualité (on ne peut avoir les deux, la qualité et le prix, c’est de l’économie basique) et alors, elles affichent quotidiennement.. des soldes.

Je vois donc sur la boîte que le prix initial de la chaussure était 55 euros, et j’ai la chance de la trouver à 50% de réduction. Je fais confiance automatiquement. Cela veut dire que c’est une chaussure plutôt correcte. Alors, qu’en fait, pas du tout. Mais, comme je me trouve dans un grand magasin de chaussures bien connu, par réflexe, je me renseigne auprès de la vendeuse sur le pays de fabrication : le Vietnam. J’hésite, car j’espérais que c’était le Portugal, l’Espagne.. Finalement, je me dis que ce n’est pas la Chine (bien qu’il y ait Chine et Chine, paraît-il) et je sors ma carte bancaire. Le lendemain je retourne avec les jolis escarpins dans leur emballage d’origine, et je fais voir au responsable comment se présente la semelle intérieure, après exactement deux heures de marche: comme du papier déchiré.. Il rougit, prend un air étonné de circonstance (« un défaut de fabrication, très rare.. », « vous êtes la première »), mais il crédite ma carte tout de suite.. Non, ce n’est pas rare. Les marques auxquelles je faisais confiance il y a dix-quinze ans sont maintenant des groupes financiers..Ils n'ont plus rien à voir avec la chaussure, en tant que telle..J’entre dans une autre boutique et je choisis des escarpins fabriqués en Allemagne, à 75 Euros.. Une très bonne qualité, cette fois-ci. 

Petite recherche dans les Archives de ce blog avec les mots-clés « business et pauvreté»:

« Making money » -2012 ;

« C’est comme ça que je t’aime… » -2012 ;

« Faut-il tuer les pauvres ? »-2013 ;

« La justesse, la justice » -2013