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08/07/2024

Le 7 juillet 2024

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(Photo - Nice. By the window)

Plus que jamais, au lendemain du second tour de ces élections législatives très spéciales, j’ai ressenti, à part la tristesse, un profond soulagement que tu ne vives pas ici, mais de l’autre côté de l’Atlantique, sur cette autre planète, comme on dit couramment et jalousement. Il y a exactement vingt ans (l’été 2004), tu revenais à Nice (où ton chemin avait commencé au Céram/Skéma Sophia-Antipolis), avec un beau diplôme américain obtenu au College of Charleston. Tu pensais trouver un emploi, avec ce diplôme franco-américain en Business Administration, mais tu t’es confronté au serpent qui se mord la queue, et que j’avais aussi connu avant toi : pas de travail sans titre de séjour, et pas de titre de séjour sans travail. En théorie, c’est ainsi. En tout cas, pour des Européens de l’Est pas encore dans l’UE, la théorie était respectée. Tu es retourné en Roumanie, dans cette jungle de la corruption, du clientélisme, des anciens communistes et des hommes de la Securitate enrichis du jour au lendemain et devenus hommes d’affaires et chefs de partis politiques, où tu envoyais des CV auxquels tu ne recevais aucune réponse, évidemment. Tu l'avais d’ailleurs fait en France, à ton retour des Etats-Unis, et personne ne te répondait non plus. La France a énormément de points de ressemblance avec la Roumanie communiste (et post-communiste), des points communs idéologiques, n’oublie pas. Moi, je l’ai découvert à mes dépens, et, à partir de 2004, j’ai ouvert ce blog comme témoignage, en faisant attention à ce que j’écrivais, car il y avait des incidents ‘techniques’ parfois, c'est pourquoi plus tard, en créent CEFRO, j’avais pris un abonnement pro. Mais, il faut que les choses soient formulées, exprimées, sinon, ce ne serait pas juste. J’ai soutenu, quand même, une thèse française sur l’éthique (enfin, sur l’Ethos dans la psyché). 

Alors, tu as pris la décision de retourner, c’est-à-dire d’émigrer, sur l’autre planète. Heureusement. Je t’assure, crois-mois, tu n’as rien à regretter, jamais. C’était un prix fort, car nous vivons loin les uns des autres, mais nous avons la technologie et nous pouvons nous appeler et nous voir. Il faut toujours faire le bilan des billes blanches. CEFRO m’a aidée en ce sens. Souviens-toi que je l’ai créée avec ma part d’héritage du modeste deux-pièces de mes parents, et que mon projet initial d’un Centre de formation pour les cadres entre la France et la Roumanie (qui aurait nécessité un soutien institutionnel, ce n’était pas comme si j’ouvrais un commerce de fruits et légumes) m’a fait taper à toutes les portes des institutions françaises, roumaines, européennes, au risque de passer pour une illuminée. Non, c’est une preuve de ce que l’on peut « réaliser » dans un environnement exclusivement relationnel, ou qui pratique le nivellement par le bas. Tu n’as pas eu à connaître les fameux contrats d’insertion (comme si tu sortais de prison), ou les contrats emplois solidarité, ou les innombrables associations, les stages inutiles et tant d’autres formules ingénieuses qui font le business de la pauvreté. Et en supposant que tu aies eu un vrai emploi en France, dans ton domaine (c’est difficilement imaginable, mais supposons), tu aurais eu vite la tête coupée (une image) à cause du type de management ou du harcèlement au travail, qui est un art… S’épanouir au travail, ça n’existe pas. Le capitalisme, le libéralisme, voilà de gros mots. Bientôt, les camarades vont défiler dans la rue pour la retraite à 50 ans…

11/06/2021

Le Plan

 

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(Mes photos- Perrier- Citron Vert)

 

Le gouvernement roumain devra revoir sa copie, son Plan national de résilience et de relance (PNRR) ayant reçu de la part de la Commission européenne pas mal d’observations. Une simple recherche en ligne nous permet de nous informer: la Roumanie n’a pas évalué les investissements de manière spécifique mais globale, les coûts ne sont pas justifiés, les méthodologies de calcul sont absentes, les informations liées aux différents projets ne sont pas claires, les données et les documents justificatifs sont insuffisants, les montants envoyés par le gouvernement et les documents comptables (en Excel) ne concordent pas... 

J’ai jeté un regard sur le plan roumain et sur le plan français. Bien entendu, le PNRR roumain sera quelque peu différent du PNRR français - question de développement ou de retard. Le plan français, pour lequel la France sollicite un financement de la Facilité pour la reprise et la résilience à hauteur de 40 milliards d'euros, un plan préparé avec l’ensemble des administrations concernées et qui a fait l’objet d’une consultation des parties prenantes, poursuit trois priorités clefs (l’écologie, la compétitivité et la cohésion sociale et territoriale) et comporte neuf composantes : rénovation énergétique ; écologie et biodiversité ; infrastructures et mobilités vertes ; énergies et technologies vertes ; financement des entreprises ; souveraineté technologique et résilience ; mise à niveau numérique de l’Etat, des territoires et des entreprises ; culture ; sauvegarde de l’emploi, jeunes, handicap, formation professionnelle ; recherche, Ségur de la santé/dépendance, cohésion territoriale.  

Le PNRR roumain (29,2 milliards d'euros) est publié sur le site du Ministère pour les investissements et les projets européens, ministère qui est le coordinateur national du processus d’élaboration avec l’ensemble des ministères et aussi le négociateur avec la Commission. Le plan est structuré autour de six domaines : transition vers une économie verte ; transformation digitale ; croissance et développement économique durable ; cohésion sociale et territoriale ; santé et résilience des institutions ; enfants, jeunes, éducation et compétences.

Depuis son entrée dans l’UE en 2007 (mais même avant, quand elle avait le statut des PECOs - pays d’Europe Centrale et Orientale), la Roumanie a bénéficié de fonds structurels et d’autres fonds européens à travers de nombreux programmes (agriculture, transports, formation, communications, etc.). Normalement, on devrait constater que ces fonds ont servi au développement de ces secteurs-là, mais il n’en est rien. Ils ont servi aux prospères affaires personnelles. Au début, l’argent européen était plus facile à détourner parce que les « projets » présentés à la Commission étaient suffisamment démagogiques et ronflants (à cause de ou grâce à la riche expérience d’une idéologie communiste basée sur des évaluations et des rapports imaginaires). Les commissaires européens à l'Elargissement, eux aussi, étaient des bureaucrates parfaits. A un moment donné, l'OLAF (l'Office de la lutte contre la fraude) est entré en scène, mais bizarrement, à chaque fois qu’il venait enquêter en Roumanie, il ne trouvait rien de suspect. Avec le temps, les conditions d’accès aux fonds européens devenant plus précises, la Roumanie a perdu sa motivation pour monter des projets… Ce qui est bien compréhensible. Elle s’est tournée plutôt vers des partenariats bilatéraux, son travail consistant à élaborer des ingénieries financières pour siphonner légalement l’argent de l’Etat.

Il est évident que la Roumanie manque de gens compétents pour réaliser de vrais projets essentiels à son évolution. Elle affiche le plus bas taux d'absorption des fonds européens. Le flou, l’approximatif, le manque de rigueur ont toujours été les caractéristiques des administrations roumaines. Elles sont la conséquence directe du clientélisme et du népotisme, comme critères de sélection partout, et de la corruption. Et cela date d’avant le communisme, car on est aussi aux portes de l’Orient. Je crois que la Roumanie illustre le mieux le syndrome Dunning-Kruger, ou l’effet de sur-confiance, qui est un biais cognitif : pour pouvoir se rendre compte de son incompétence, il faut avoir un minimum de compétence (voici la note de CEFRO qui l’explique http://www.cefro.pro/archive/2016/10/03/le-syndrome-dunni...).  

J’avais l’intention d’aller chercher quelques notes dans les Archives de ce blog et indiquer les liens, mais j’ai renoncé. Je me protège, en évitant, si je peux, de revivre les souvenirs et les émotions liés aux efforts autour du projet de Centre de formation pour lequel je n’avais pas trouvé de soutien institutionnel de la part de la Roumanie (de la France non plus, vu que le projet concernait la formation au bénéfice des cadres roumains). « Chaque pays européen est gestionnaire des fonds qu’il reçoit », me répondaient invariablement les exécutifs européens que je contactais avec persévérance. Finalement, j’ai donné une autre forme au projet initial en créant CEFRO, qui a travaillé entre 2008-2020 comme fournisseur et organisateur de cours pour deux programmes européens d'Education et de formation tout au long de la vie. Mais c’est comme si je réalisais un béret, quoique un joli petit béret, au lieu d’un manteau. En tout cas, les lecteurs de ce blog pourront toujours taper dans la case Rechercher (la version classique du site, pas l’application) un mot-clé : fonds, corruption, projet, programmes, Roumanie, Commission européenne, compétences, fraude, etc. Une multitude de notes s’afficheront. Dix-sept-années et un tableau vivant.

08/10/2019

Attaque à la Préfecture

Avec l’attaque commise le 3 octobre au cœur de l’Etat, à la Préfecture de police de Paris, par un fonctionnaire qui y travaillait depuis 2003, habilité au service Secret défense dans le renseignement antiterroriste, et qui s’était converti à l’islam depuis une dizaine d’années pour finalement se radicaliser, la France connaît un nouvel acte de l’islamisme agissant de l’intérieur. Cette fois-ci, il s'agit d'une blessure particulièrement profonde de l’Etat et de ses institutions, et aussi de ses citoyens - du moins dans leur majorité.

Abasourdis par le caractère totalement inédit de cet événement tragique, où un cap difficilement imaginable vient d’être franchi, les médias, les politiques, les intellectuels, enfin tous ceux qui sont autorisés à faire et à représenter l'opinion dans ce pays, ne trouvent ni les paroles qui expliquent, ni les paroles qui rassurent. Les mêmes paroles, déjà abondamment utilisées lors des actes terroristes précédents, semblent ne plus avoir cours: elles sont usées, elles ont perdu toute force de vie et se sont pétrifiées, en se banalisant. Paradoxalement, leur seul effet est d’augmenter l’incertitude et la peur. Mais au milieu de tout cela, un mot nouveau va percer avec courage: "dénislamisation", le déni d'islamisation. Un mot qui résume tout.  

Ce sont juste ces quelques lignes que je me devais de noter ici, à propos de la tuerie au couteau au sein de la Police française. Je vis en France depuis vingt-cinq ans, après avoir vécu un peu plus en Roumanie, donc je me garderai bien d’émettre clairement une opinion trop personnelle -et pour cause.. 

Je vais recommander un livre qui vient de sortir (je l’ai fait sur Facebook), en transcrivant aussi un extrait. 

DSC_1431.JPG"L'homme-le-plus-sanguinaire avait fait massacrer tous les caïds susceptibles de le contester. En quelques jours, son territoire s'était étendu de la Seine-Saint-Denis à toute la rive droite, de la gare de Lyon jusqu'au Louvre. Il avait pu faire incendier le Musée d'art et d'histoire du judaïsme, et le mémorial de la Shoah. Puis les synagogues, les cathédrales et les églises. Le calife en personne s'était amusé à canarder Notre-Dame, au mortier, depuis la rive droite, jusqu'à abattre sa flèche oecuménique, récemment reconstruite par un architecte haïtien, en forme de poing arc-en-ciel, à la gloire du très-bien-vivre-ensemble. Les conseillers du calife s'employaient à tempérer sa folie meurtrière, en le pressant de limiter les exécutions aux Juifs, aux déviants, homosexuels ou "visiblement assimilés", ce qui du point de vue du Califat, faisait du monde. Sans oublier les croisés qui lui résistaient. Il ne laisserait personne entraver son ascension. Il voulait asservir ce pays, le purifier totalement, y imposer la loi d'or de l'islam, qui passerait par sa domination. Il serait le plus grand serviteur d'Allah et l'histoire ferait de lui son prophète." (Laurent Obertone, Guerilla, Le temps des barbares, Editions Ring, 2019, p. 127)

10/06/2019

Les tilleuls

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(Mes photos- Le Vieux Nice)

C’est le temps des tilleuls en fleurs. Leur parfum me transporte au bord du Danube, dans une ville qui est restée figée depuis trois décennies. Je m'y rends de plus en plus rarement, le voyage est long et difficile à cause de la vétusté du réseau ferré, ou de la dangerosité de la route à deux bandes qui vient de Bucarest, et sur laquelle circulent des bolides achetés à l’étranger, mais qui rouleraient normalement sur une autoroute. Or, une autoroute, ça n’existe pas à l’est du pays, à peine si l’on en compte quelques kilomètres entre la capitale et le littoral. Bref, le pays a environ 800 km de réseau, et évidemment un tas de projets (vous trouverez un mélange fait de réel et de virtuel en tapant sur Google, on vous sort même Wikipédia).

Cela fait deux ans que je n’y suis plus retournée, et si les choses allaient déjà très mal la dernière fois, il n’y a aucune raison pour que cela change, donc je me contente du parfum des tilleuls.

J’ai sélectionné dans les Archives quelques notes entre 2009-2017, écrites à chacun de mes retours. Par réflexe professionnel, je perçois mon état d’esprit à travers le récit, forcément il est fluide, il est fait de mémoire, d’appréhension, de colère, d’espoir, car je suis vivante, mais le cadre est inchangé, comme une tombe. « C’est notre moi qui passe… ». Le paysage politique est, lui aussi, couvert de poussière depuis trente ans, et ce que j’écrivais en 2009, est valable en 2019. Oui, irrespirable.

Cet été, mon fils a décidé de revenir en Europe pour deux semaines de vacances, avec sa petite famille (il gardera deux semaines pour l'année, c'est déjà énorme, comme vacances, pour un Américain, mais le temps passe et il a l'ancienneté qui l'y autorise). Néanmoins, plus question d'un autre voyage en Roumanie, comme l'année dernière..Je l'avais prévenu, tout en respectant son désir d'y aller, même si ce n'était que pour trois jours. Ils avaient donc fait un aller-retour, juste pour voir une ville en train de mourir au bord du Danube, et réserver une chambre dans un Bucarest hystérique et chaotique, avant le vol de retour à Nice.. Cet été, ce sera juste Nice, avec un bonus: le match en demi-finale de la Coupe du monde féminine 2019. Claudiu est aussi un arbitre professionnel, et Rowen, 12 ans, joue déjà dans une équipe de soccer. Si la météo n'est pas au-rendez-vous, nous aurons les heures précieuses des retrouvailles sur la Côte d'Azur, et ce spectacle.   

En Roumanie/Printemps 2009

Roumanie, avril 2011

Les enjeux des élections européennes pour la Roumanie (2014)

Elections Roumanie (2014)

La Roumanie irrespirable (2017)