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12/12/2021

Voyage aux Etats-Unis/Novembre-Décembre 2021

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(Mes photos -Greenville, S.C)

Les grands voyages, surtout quand ils n’ont pas un but touristique, comme dans mon cas, ont pour caractéristique commune de vous recentrer sur vous-même, de vous amener à vous interroger sur le sens de votre vie - passée, présente, future. C’est un mécanisme semblable au parcours initiatique. Souvenons-nous que le héros du roman se déplace et agit, en effectuant le trajet du Sujet singulier qu’il est. La vie est un roman dont vous êtes le héros, le narrateur, le lecteur, et, d’après certains, l’auteur.

Le livre récent de Luc Ferry, Une histoire de la philosophie pour les nuls, résume les réponses apportées par l’esprit humain au cours des siècles aux questions fondamentales du sens de l’existence et de la souffrance. Au tout début, les deux sphères de la vie de l’esprit, la philosophie et la religion, avaient un but commun: donner un sens à la vie et vaincre l’angoisse liée à la mort, en proposant une définition de la sagesse et de la vie bonne. Mais elles ont divergé sur la manière d’atteindre ce but: passer par la foi, ou bien par la lucidité de la raison. Toutes les grandes doctrines philosophiques sont structurées autour de trois axes: le premier, c’est le monde ou le terrain de jeu (la vérité, la connaissance vraie et accessible), le deuxième, ce sont les relations entre les êtres (amour et haine, égoïsme et générosité, préoccupation pour les intérêts particuliers mais aussi pour le Bien commun), à savoir les règles du jeu ou la morale et la politique ou la philosophie pratique, et le troisième, c’est le but du jeu, le fameux pourquoi. L’existence a-t-elle un sens ? Spinoza et Nietzsche disent que non. La philosophie, qui, étymologiquement, est une quête de la sagesse, prend aussi la forme d’une doctrine du salut, mais sans Dieu (c’est pourquoi, elle est une spiritualité laïque). Le salut, nous rappelle l’auteur, réside dans le fait d’être sauvé d’un grand danger ou d’un grand malheur, à savoir des peurs qui emprisonnent notre existence et nous empêchent de parvenir à la sérénité. Parmi toutes, la peur de notre finitude est la plus forte.

 Le livre de Luc Ferry, qui s’adresse aux nuls, est donc structuré de manière didactique (je ne suis pas nulle, mais j’ai admiré la méthode), il explique les réponses apportées par les grandes philosophies et nous fait voir où nous pouvons nous situer à présent. La première réponse est celle des sagesses anciennes (Homère, les stoïciens, les épicuriens, le bouddhisme), autrement dit, une cosmologie: la vie bonne est la mise en harmonie de soi avec l’univers pour devenir un fragment d’éternité. La deuxième réponse est celles des grandes religions: se mettre en harmonie avec les commandements divins, pour arriver au salut, pour mériter d’avoir un droit d’entrée dans une vie éternelle qui sera infiniment meilleure au ciel que sur la terre. La troisième réponse consiste à mettre sa vie et sa pensée non plus en harmonie avec le cosmos ou avec le divin, mais avec l’humanité, c’est la perspective héritée des Lumières et de l’idée républicaine (l’harmonie, c’est la paix et la justice, c’est mettre sa vie en harmonie avec celle des autres et apporter, autant que possible une contribution au progrès humain, une pierre à l’édifice, et qui restera dans la mémoire des Hommes). La quatrième réponse est celle des grands philosophes du soupçon, Schopenhauer, Marx, Nietzsche, Freud, Heidegger (et leurs différents épigones français de la « Pensée ‘68 »). C’est la philosophie de la déconstruction des naïvetés des siècles passés, des métaphysiques anciennes et des religions, mais aussi de l’humanisme des Lumières. Il s’agit de libérer les êtres humains des différents visages de l’aliénation (celle-ci pensée sur un mode individuel chez Nietzsche ou Freud, ou sur un mode collectif chez Marx). Chez tous ces grands déconstructeurs, y compris Marx, le but est de se mettre en harmonie, non plus avec l’univers, le divin ou l’humanité, mais avec soi-même. Le souci de soi, comme l’appelait Foucault, caractérise l’époque actuelle, celle de la quête du bonheur individuel (psychologie positive, théories du développement personnel). La cinquième réponse vise une harmonie non plus juridique, morale et politique avec l’humanité en général, mais une harmonie affective et amicale, au sens large, avec le prochain et avec celui que nous aimons ou que nous pourrions un jour rencontrer. L’auteur l’appelle un deuxième humanisme ou humanisme de l’amour, un spiritualisme laïc qui s’oppose au premier humanisme, celui des Lumières, qui reste encore un humanisme de la rationalité et de la science. D'après l’auteur, la grande erreur des déconstructeurs a été de croire que la liberté supposait la liquidation de toutes les valeurs supérieures à l’individu. Nietzsche entendait bien casser toutes les idoles, toutes les valeurs transcendantes. Le spiritualisme laïc pour lequel plaide l’auteur est donc un humanisme de l’altérité et de l’amour, qui réinvente de nouveaux rapports au sacré, à des valeurs qui dépassent l’individualisme narcissique issu de la déconstruction des valeurs traditionnelles.

J’aime bien Luc Ferry, je lis certains de ses ouvrages et je l’écoute quand il intervient à la radio ou sur un plateau TV. Il est vrai que son point de vue sur une harmonie affective amicale au sens large avec le prochain me parle beaucoup moins que l’harmonie juridique, morale et politique. En revanche, je sais parfaitement que la meilleure arme de défense peut être la politesse, et c’est une construction, un code social. Parfois, vous ne disposez que de cela pour protéger votre vie. En général, je partage ses opinions politiques, sauf quand il parle de l’Europe des 27 qui ne devrait pas être à 27, mais qui devrait revenir aux pays fondateurs. Il ne précise pas de quels pays l’UE devrait se débarrasser pour aller mieux, mais il ne faut pas être un génie de l’analyse politique pour comprendre. Or, pour la Roumanie, être membre de l’UE, c’est l’unique chance d’exister dans le monde actuel. Bien entendu, en Roumanie aussi, comme ailleurs, le courant identitaire qui clame «l’autonomie et l’indépendance » est entretenu par des populistes.

J’ai fait ce grand voyage aux Etats-Unis parce que mon fils vit là-bas depuis plus de vingt ans, heureusement pour lui. Je suis bien placée pour le dire. C’est un monde organisé, efficace, où le travail, qui compte énormément, est fait de manière professionnelle. Un monde qui sait se redresser après un désastre. On y rencontre un esprit civique, un respect de l’autre, une amabilité qui doivent venir du respect de la loi, mais aussi de la conscience du travail que chacun fait, qu’il soit bag boy (celui qui met vos courses dans des sachets au supermarché), ou serveur au restaurant, payé quelques dollars de l’heure (ses revenus dépendant du pourboire), ou directeur dans une compagnie (et là, quel rythme de travail, quel investissement personnel et professionnel!).

Comme je l’ai écrit au début, ce grand voyage aux Etats-Unis n’a pas été un voyage touristique. J’ai un visa pour dix ans, que j’ai déjà renouvelé deux fois et qui me permet d’y rester six mois. Je ne suis jamais restée plus de trois-quatre semaines. A chaque fois, mes réflexions au retour en Europe évoluent, car l’écart est toujours  important. J’accepte que le monde américain soit ce qu’il y a de meilleur pour mon fils, avec tout ce que cela comporte pour moi. Et je reviens à cette Europe qui fonctionne autrement, et surtout, à cette Roumanie, qui s’est condamnée toute seule.

Mon séjour américain, je l’ai partagé en temps réel sur ma page Facebook -des commentaires, des photos et des vidéos. Un album avec les merveilleux arbres en automne dans la Caroline du Sud ici:  (https://www.facebook.com/media/set/?set=a.101587935555686...).

Plus loin, j’ai copié les liens des posts publiés au au fil des jours.

 

Joyeux Noël ! Bonne fin d’année !

 

https://m.facebook.com/story.php?story_fbid=1015874160151...

https://m.facebook.com/story.php?story_fbid=10158747838893651&id=601148650

https://m.facebook.com/story.php?story_fbid=10158754999193651&id=601148650

https://m.facebook.com/story.php?story_fbid=10158756212993651&id=601148650

https://m.facebook.com/story.php?story_fbid=10158758065103651&id=601148650

https://m.facebook.com/story.php?story_fbid=10158762752653651&id=601148650

https://m.facebook.com/story.php?story_fbid=10158758065103651&id=601148650

https://m.facebook.com/story.php?story_fbid=10158762752653651&id=601148650

https://m.facebook.com/story.php?story_fbid=10158765220288651&id=601148650

https://m.facebook.com/story.php?story_fbid=10158768886268651&id=601148650

https://m.facebook.com/story.php?story_fbid=10158770172173651&id=601148650

https://m.facebook.com/story.php?story_fbid=10158775720393651&id=601148650

https://m.facebook.com/story.php?story_fbid=10158778430203651&id=601148650

https://m.facebook.com/story.php?story_fbid=10158779389068651&id=601148650

https://m.facebook.com/story.php?story_fbid=10158785670418651&id=601148650

 

15/03/2021

Qui a le pouvoir?

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(Mes photos- Des fleurs moins ordinaires)

J’ai lu un petit texte de Monsieur Andrei Caramitru (Facebook, le 28 février), un texte qui  résume en termes simples (Facebook n’est pas vraiment le lieu où vous publiez les conclusions d'une Thèse...) le type de mécanisme qu’il faudrait connaître « si l’on veut comprendre ce qu'il se passe dans un pays, pourquoi des décisions qui semblent absolument logiques, ou que la société demande, ne sont pas prises. A savoir, comprendre QUI est important et QUI ne l’est pas, QUI est l’élite qui décide finalement.  

En Roumanie, ceux qui ont le pouvoir ne sont ni les citoyens, ni les multinationales, ni le milieu d’affaires, ni le Président, ni le Premier ministre, ni les partis politiques. Le pouvoir est chez les fonctionnaires publics et les structures de forces intérieures (le Ministère de l’Intérieur, les Services spécialisés de renseignements, les magistrats). Cela est visible dans la manière dont est réparti le budget : des pensions spéciales, des salaires énormes et des augmentations vont vers ces secteurs. Personne ne peut les diminuer, malgré toutes les tentatives. Nous pouvons voter pour qui nous voulons, nous pouvons nous révolter, aucun résultat. Ce sont eux qui ont le pouvoir. Attention, ils ne sont pas contrôlés par les partis politiques, c’est l’inverse - ce sont eux qui les contrôlent. Le milieu d’affaires n’est pas pertinent non plus, les multinationales ont beau vociférer, elles n’ont aucune influence. L’unique chance pour une vraie réforme, c’est une pression venue de l’extérieur de la part des centres de pouvoir plus grands: les Etats-Unis, l’Union européenne et les marchés financiers (si l’on n’obtient plus de fonds, nous sommes menacés de faillite). Nous pouvons être très vocaux sur les réseaux, le Premier ministre Cîtu peut dire ce qu’il veut, c’est inutile.

Aux Etats-Unis, tout est différent. Ce sont les grands business qui ont le pouvoir. Ils sont nombreux, et surtout ils ne sont pas ossifiés comme en Europe - il y a 20 ans, les plus grandes firmes étaient dans l’industrie et dans le pétrole et le gaz. Aujourd'hui, ce sont les Big Tech qui comptent, ce sont eux qui décident, rapidement et brutalement, de la stratégie. Voilà pourquoi le modèle économique des Etats-Unis a le plus de succès. C’est un capitalisme dur, la décision appartient en fait aux business, ceux-ci doivent être rentables, avoir une capacité constante d’innovation, être compétitifs et s’assurer que les règles du jeu et la puissance des Etats-Unis sont bien là.

En Europe de l’Ouest, c’est encore autre chose: le pouvoir se trouve dans la combinaison de la bureaucratie d’Etat et d'un certain nombre de grandes compagnies anciennes, fondées entre 1900 et 1950. Il n’y a pas de place pour la croissance de nouvelles compagnies en Europe, les anciennes n’y voient aucun intérêt, elles ne veulent pas d’une évolution constante comme aux Etats-Unis, car elles y perdraient. En Allemagne, par exemple, le pouvoir est chez les grandes compagnies automobiles, ce qui explique le manque de fermeté à l’égard de la Chine ou de la Russie. Ceux qui détiennent le pouvoir réel (les familles qui contrôlent Daimler/BMW/VW) ne veulent pas perdre une bonne partie du business. En France et en Italie, où le pouvoir de la bureaucratie est immense, le business ne compte pas beaucoup, ce qui fait que toute réforme, même minime, est impossible. D'où une stagnation totale là-bas.

En Roumanie, l’évolution est et sera lente, les réformes plus dures ne pourront être faites que lorsque il n’y aura plus d’argent. En général, évitez donc de vous faire trop d’illusions, la révolte sur Facebook ou le vote ne changeront strictement rien (certes, on peut toujours voter pour limiter un peu leur pouvoir, ou pour garder la situation comme elle est). Il vaut mieux comprendre comment le monde fonctionne, prendre des décisions individuelles intelligentes, et essayer de trouver de la joie dans la vie de tous les jours. C’est tout. »

Bien évidemment, pour moi, qui connais par expérience directe la Roumanie et la France, et par expérience indirecte (mon fils) les Etats-Unis, cette caractérisation est tout à fait exacte.

26/06/2020

Un quart de siècle

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(Mes photos - Premier voyage après le déconfinement à Villefranche-sur-mer)

Le 27 juin, c’est le jour anniversaire de ma belle Thèse, La Rhétorique de la Passion dans le roman médiéval, qui a été beaucoup plus qu'une Thèse. Elle a joué un rôle de rempart pour moi en France, me permettant de résister et de garder intactes l'estime de soi, la force, la persévérance. Je le marque chaque année, à ma manière, en publiant quelque chose sur mes espaces (blogs, page Facebook), et aussi en faisant le geste rituel qui consiste à descendre l'exemplaire de son étagère et à l'ouvrir au hasard. A la fin, je m’arrête sur l'énigmatique page 283 (énigmatique dans le sens de prophétique), où j'aborde le sujet du choix, de la volonté et du processus de délibération, et à chaque fois, c'est un nouveau départ pour la réflexion. Bien sûr, par amour de la sémantique, je m’offre toujours une glace au fruit de la passion.

Une amie de longue date me suggère de relire la Thèse, puisque c'est un anniversaire plus spécial (elle l'a relue plusieurs fois, elle possède un exemplaire), mais je lui réponds qu'aujourd'hui cela m’est impossible. Ce n'est pas à cause de ma propre évolution, mais parce que c’est paradoxalement douloureux. Ma Thèse de 450 pages (je l'avais tapée toute seule) se trouvait à la croisée des chemins de plusieurs disciplines: la littérature médiévale en langue vulgaire (le roman, principalement), la philosophie et la spiritualité, lues à la lumière des développements récents des sciences modernes (linguistique, sémiotique, psychanalyse). Le jury a apprécié mon point de vue comme étant "peu habituel et enrichissant pour examiner la littérature et la pensée des XIIe et XIIIe siècles", et m'a accordé la mention Très honorable à la majorité. Pour la soutenance (à la Faculté des lettres, salle 133, de 14h30 à 18h30), j'avais mis une blouse roumaine blanche, brodée au fil de soie blanc, et une jupe noire légère à pois. La blouse, c'est mon père qui me l'avait offerte et me l'avait envoyée de Roumanie pour cet événement, il était très ému et très fier de moi.. J'obtenais donc mon Diplôme de Docteur de l'Université de Nice au bout de seulement trois ans, ce qui s'expliquait facilement par le fait que je n'avais plus 25 ans, et que j'avais déjà l'expérience de la recherche dans mes travaux antérieurs. Je disais, amusée, que j'étais Docteur en Amour, au sens le plus large. Et c'est justement l'Amour, au sens le plus large (sur lequel je m'étais penchée avec mon sérieux et ma réflexion), qui allait me protéger, m'inspirer, me guider, me soutenir. 

Pour cet anniversaire, le hasard a ouvert ma Thèse à la page 233:

"L'amour (l'agapè) est donné à l'homme gratuitement (Dieu est amour), c'est une faculté de l'homme (affectus), mais qui se manifeste différemment parce que les hommes ne la possèdent pas (ils l'ont sans la posséder). Or, posséder c'est prendre conscience de ce que l'on veut posséder (nous rappelons que l'identité entre connaissance et amour, l'un étant la condition de l'autre, est une idée très chère au Moyen Age)."

J'ai sélectionné deux liens dans les Archives (ils envoient aussi à d'autres liens), et une photo, que j'ai prise récemment : 20 ans ; 23 ans...

Photo -Représentation du Saint Suaire, Chapelle de la Très-Sainte Trinité et du Saint Suaire, Confrérie des pénitents rouges, dans le Vieux-Nice.

Par une chaude après-midi de mai 2005, je me trouvais dans cette église pour assister à une conférence sur le Saint Suaire. J'avais déjà vu le linceul de près à Turin, où j'étais allée avec mon fils en 2000 pour l'exposition publique (l'ostension), parce que j'avais à l'époque un emploi auprès de l'Evêché de Nice. Au moment même où se déroulait la conférence dans la petite chapelle du Vieux-Nice, Claudiu était en train de survoler l'Atlantique pour retourner définitivement aux Etats-Unis. 

Thèse, anniversaire

01/04/2020

La Chine et nous

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(Mes photos- Nice, l'Avenue Jean Médecin pendant le confinement)

L'article Chinavirus (que je traduis librement plus loin) met en perspective le contexte dans lequel nous vivons et nous fournit quelques données concrètes, que nous aurions pu oublier ou ignorer. Dans le texte d’origine, vous trouverez les hyperliens vers les articles en anglais cités par l’auteur.   

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