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03/03/2016

Thérapie nationale

Sa Majesté le Roi Michel de Roumanie lit en ce moment les dernières pages du livre de sa vie. Il a 95 ans, et il a un double cancer. Chaque destin est un livre, le sien a été triste, mais digne, courageux et fidèle, autant que cela a été possible, car lié à l’Histoire et à son pays. Il n’y a pas dans son livre cette page-là où il retrouvait son trône, après avoir été forcé, par le premier gouvernement roumain soviétique, à abdiquer et à s’exiler en 1947. Et donc il n’y a pas, dans le livre commun des dernières générations de Roumains, cette page-là à partir de laquelle ces générations auraient vu autre chose que le communisme-caméléon. On se souvient bien comment, quelques mois après « la révolution » de ’89, le Roi Michel a été empêché d’entrer et a dû rester à l’aéroport, à Bucarest, pour être finalement acclamé par une marée humaine à son passage sur le boulevard Nicolae Balcescu..Les années qui ont suivi ont été quelque chose d’autre, mais pour des raisons élémentaires de respect et de compassion, je vais m’abstenir, cette fois-ci, de mettre ne serait-ce que la pointe du pied sur le terrain marécageux de la politique roumaine et de ses tactiques spéciales..

Néanmoins, je pense profondément que nous devrions, au moins tant que la vie est encore là et que le Roi n’est pas encore passé dans l’histoire, offrir une réparation symbolique. C’est-à-dire reconnaître ce qui est notre part de responsabilité, en tant que peuple. Au lieu de souhaiter quasiment l’impossible à celui qui est maintenant un homme sur un lit d’hôpital, nous ferions peut-être mieux de nous voir tels que nous avons été et que nous sommes vraiment, et de le dire, de le formuler, comme dans une thérapie, pour nous délivrer de l’impuissance, de la duplicité, de la lâcheté qui nous collent à la peau comme une seconde nature. Cela vaudrait cent fois plus que des prières..

Je garde les réponses que j’ai reçues de Versoix (en 1998, 2000, 2001, étape à laquelle je cherchais un soutien à mon projet avec la Roumanie), peut-être plus précieusement que les diverses réponses que j’ai pu accumuler de la part de responsables roumains, européens ou autres, au fil des années. Mais il existe un temps propice pour toute chose, et il faut saisir les moments de grâce ou de chance lorsqu'ils se manifestent. Et s’ils ne se manifestent pas tant que vous en avez encore le désir et l’espoir, il faut tourner le dos, et prendre une autre route. En ce qui me concerne, la Roumanie ne représente plus le but de ce projet-là. A la limite, elle peut être un élément de l'ensemble, mais absolument pas indispensable. 

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01/03/2016

Porte-bonheur

1er mars,martisorC'est le martisor que j'offre à ce blog. Selon une tradition inoffensive (car il faut préciser), il symbolise le printemps, le renouveau, et il est censé porter chance. Celui-ci, c'est un ramoneur, mais cela aurait pu être une fleur, un trèfle à quatre feuilles, une coccinelle, une Mini Rover Cooper, une subvention, un appartement, un partenariat de travail.. 

 

15/02/2016

Liberté d'expression



loi,dignité,diffamation,liberté d'expression,roumanie,politiquement correct,droits(Mes photos -E.T., création personnelle 2004)

Il y a quelques mois, je transposais un article qui m'avait plu, à propos du projet de la Loi contre la diffamation sociale… initié par le président du parti social-démocrate en Roumanie. Petit rappel:

« Deux choses sont à la base d’une société libre, ouverte : l’Etat de droit, c’est-à-dire le règne de la loi, et la liberté d’expression. Si vous ne les avez pas, vous ne vivez pas dans un pays libre » (Salman Rushdie). La Loi de Liviu Dragnea –appelée cyniquement et hypocritement « la loi contre la diffamation sociale et pour la tolérance et la dignité humaine » est un scandale national et un danger public extrêmement important. Cet individu, après avoir été le bras exécutif d’une tentative de coup d’Etat (2012), est en train de récidiver, en instrumentalisant probablement la plus grave menace contre la liberté d’expression après 1989 dans ce pays, compte tenu des circonstances nationales et internationales. Remarquez, s’il vous plaît, que les « politruk » vauriens de la même espèce ont compris comment fonctionnait le politiquement correct et quelle était sa logique qui permettait d’en retirer des avantages, de l’immunité, de la légitimité et des bénéfices. Suivez comment un maraîcher du sud du pays, semi-illettré, vient de découvrir la roue de la politique progressiste occidentale, et comment il cherche à s’offrir la protection des grands du politiquement correct en Occident, afin de s’assurer la légitimité et l’immunité. Regardez à l’œuvre les mécanismes purement intéressés, opportunistes et immoraux, grâce auxquels le politiquement correct s’étend partout dans le monde, et par lesquels les « élites » intéressées à s’assurer des avantages et le contrôle social, ferment la bouche aux citoyens. Remarquez aussi comment, ici comme en Occident, une récente catégorie de potentiels avantagés matériellement voit le jour suite aux mesures nouvellement prises : de nouvelles opportunités d’emploi, de redistribution de ressources, de nouvelles positions d’autorité et de contrôle dans l’appareil d’Etat. Tous de type parasitaire. Méditez à la manière dont l’idéologie du politiquement correct, implémentée à travers la législation et les institutions, nous étouffe et nous confisque peu à peu, sous nos yeux, la liberté d’expression, dans les applaudissements des intellectuels, des semi-intellectuels, des tiers-intellectuels et des idiots utiles qui sont convaincus, dans leurs têtes, que c’est comme ça que les choses doivent aller, puisque, n’est-ce pas, l’Occident va dans cette direction.. » (l'article est cité dans ma note d'octobre 2015).

 Ces derniers jours, la Loi est en train de franchir les pas qui lui restent avant d'être définitive, et elle enflamme la toile roumaine. Plus de 3000 de commentaires défavorables ont été publiés sur la page du cerveau politique qui l’a produite/compilée, tous effacés en une nuit.

La question qui se pose est, bien sûr, comment procéder quand la liberté d’expression entrera en conflit avec « la dignité ». Par exemple, nous explique ce juriste, j’exprime une vérité -en m’appuyant sur des faits objectifs, des textes, des réalités, etc. , -une vérité qui vient en conflit avec « la dignité » d’un musulman, qui, lui, considère que je porte atteinte à son « image ». Quelle dignité prévaudra ? La mienne, qui dit une vérité « de facto », ou la sienne, qui considère que son image est atteinte par la vérité désagréable que j’énonce ? Lorsque notre liberté à exprimer des vérités -des données et des faits objectifs- entrera en conflit avec « la dignité » ou « l’image » de X ou de Y, tout dépendra de la personne qui interprétera et appliquera cette Loi. Plus exactement, notre liberté d’expression dépendra de la compétence, de l’objectivité, de la logique, de l’honnêteté, de la bonne foi et de la vision de cette personne à l’égard de ces deux droits fondamentaux en conflit.  

Dans sa forme initiale, la Loi prévoit des sanctions et des amendes. C’est  surtout cette perspective qui a suscité des réactions chez les Roumains, qui se voyaient tout à coup privés de l’illusion de compter pour quelque chose en s’exprimant sur Internet. L’ambassadeur des Etats-Unis à Bucarest vient de déclarer que « défendre la liberté d’expression, même dans les cas où cette expression peut offenser, représente un aspect fondamental dans une société démocratique saine. Nous condamnons la discrimination et la haine, et en même temps, nous nous opposons aux lois qui interdisent l’expression offensante au prix de la liberté d’expression ». Aux dernières nouvelles, la Loi en question sera amendée avant d’être votée. Elle ne prévoit plus aucune sanction. « Nous pouvons continuer à insulter à la télévision et sur Facebook », titre un site d’infos. C’est déjà ça.    

15/01/2016

L'esprit d'une langue

DSC_1441.JPG Une formule consacrée dit que Mihai Eminescu (15 janvier 1854 -15 juin 1889) est un poète national et universel. National, il l’est sans l’ombre d’un doute, mais son universalité réside plutôt dans les thèmes de ses poèmes –l’amour, la nature, l’histoire, le devenir –que dans une trop souvent invoquée notoriété au-delà des frontières culturelles de la Roumanie. La vérité est que très peu de traductions valables ont pu le faire connaître, et seulement dans deux-trois langues de large circulation. Alors, affirmer que « le grand poète Eminescu est traduit dans toutes les langues » est, encore une fois, l’un des nombreux rêves de grandeur typiquement roumains, assez loin de la réalité. Comme on sait bien, on ne traduit pas vraiment la poésie, mais on la transpose, et cela parce que la métaphore est liée aux règles sémantiques de profondeur propres à l’esprit de chaque langue, à sa philosophie, c’est-à-dire à sa perception et à sa vision d’elle-même et du monde. C’est donc la vision qu’une langue exprime qui lui donne accès à l’universalité. Vouloir, ce n’est pas toujours pouvoir. Evidemment, j’aime Eminescu, et j’ai dans ma bibliothèque à Nice ce petit recueil de poésies dans une édition scolaire, du temps de mes études (ou de celles de Claudiu Nedelea), et ce billet de banque qui n’est plus valide.. Mais c’est ma façon de marquer le jour.

Pour la même occasion, j'écrivais ceci en 2009.