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08/01/2019

Le cancre entre en scène

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(Mes photos-Mon bouleau argenté)

On ne l’aurait pas imaginé, mais c’est un fait : la Première ministre roumaine est la responsable de la Présidence de l’UE, pour six mois. Sur Internet, on peut trouver de nombreux titres concernant la Roumanie en ce moment, et, pour une fois, la presse européenne et internationale donne des détails et formule ses inquiétudes. Le Journal d’information de la TVRi fait passer en bas de l’écran l’annonce de la cérémonie en direct pour ce 10 janvier à 22 heures, l’heure roumaine (très discrètement, d'ailleurs, une seule fois, je ne sais même pas comment je l'ai aperçue). Je ne voudrais surtout pas manquer ce moment historique, je serai donc devant mon poste de télévision, en France.

Le seul souci de la Présidence roumaine, exprimé dans le discours officiel de sa responsable, concerne « l’image du pays ». En d’autres termes, une mise en garde contre les critiques, sinon vous êtes traître à la patrie. N’empêche, tout le monde est au courant que la patrie est gouvernée par un groupe infractionnel organisé, et l’évolution est telle, que même les officiels européens semblent avoir mis en veilleuse la langue de bois. Pendant six mois, la Présidence serait en charge d’environ deux cents dossiers européens, alors que le gouvernement roumain n’est obsédé que de sa cuisine interne : comment échapper à la justice, comment subordonner la justice, enfin, le peu de justice qui existe dans les procédures en cours, car les humains censés la rendre sont eux aussi, des êtres faibles… Mais déjà le gouvernement roumain annonce prudemment qu'il fera office de médiateur...Comprenez ce que vous voulez..La Finlande fera le reste.

La meilleure, c’est que le leader du parti communiste au pouvoir (nommé parti social-démocrate, je rappelle), le leader qui dirige sans gouverner, car il est empêtré dans des affaires judiciaires, eh bien, celui-ci vient de porter plainte contre la CE, à savoir contre l’OLAF, l’organisme européen qui l’accuse de fraude. Alors, l'OLAF va-t-il aller au bout ? Car cela fait des années qu’aucune de ses enquêtes ne peut aboutir en Roumanie. A ce sujet, j’ai fait une recherche dans les archives, afin de trouver quelques souvenirs. En voici trois datant de 2004 et de 2007, mais il y en a beaucoup où figure OLAF.. J'ai gardé aussi leur réponse formelle, et aujourd'hui encore, je vois comment le rouleau compresseur d'une administration peut valoir celui d'une pieuvre mafieuse, en termes d'efficacité, de résultat.  

Correspondance/OLAF/CE (2004)

Correspondance (réponse OLAF 2004)

OLAF essaie d'investiguer en Roumanie (2004)

Update (2007)

20/11/2018

Transmission

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(Mes photos -Ginkgo à Nice)

Les cadeaux que la Roumanie vient de recevoir, quelques jours avant la célébration de son Centenaire et quelques semaines avant qu’elle n’exerce la Présidence du Conseil de l’Union européenne, ce sont le Rapport MCV de la Commission européenne et la Résolution du Parlement européen concernant les réformes de la justice.. Le Rapport MCV (mécanisme de coopération et de vérification) est le plus sévère depuis dix ans. La Roumanie a régressé à l'époque d'avant son adhésion. Le Gouvernement finlandais serait prêt à assurer la Présidence du Conseil de l'Union européenne en janvier prochain si la Roumanie n'était pas prête. Le Gouvernement roumain, par son Ministère des Affaires étrangères, déclare en langue de bois que tout va bien, que le calendrier est respecté (j'avoue être partagée entre le désir de le voir se casser la figure, et le désir d'épargner l'UE). La classe politique crie au scandale, les dirigeants sont offusqués et se lancent dans des discours anti-européens hauts en couleur, parfois soulignés par des gestes obscènes au parlement. Le côté balkanique, nationaliste, susceptible, doublé d'un complexe d’infériorité (« l’histoire des petits pays », écrivait Kundera) se trouve sur-compensé dans des affirmations hallucinantes sur la nette supériorité de la culture roumaine par rapport à la culture de l’Occident. C’est triste, voire médical. Le déni se propage et contamine les Roumains déjà divisés depuis toujours. « Nous avons assez d’être traités comme des européens de seconde zone - crie une députée roumaine au Parlement européen - et nous n’avons pas besoin des leçons que Bruxelles n’arrive pas à donner aux autres pays ».

Et dans ce contexte, la vidéo montrant le Président de la Commission européenne avec une chaussure noire et une chaussure marron, la démarche hésitante comme souvent, est reprise et diffusée sur Internet en guise de preuve: voilà, ce sont ces gens-là… Bien entendu, tous les responsables européens ne sont pas des personnes dépendantes en poste. Ensuite, pour tout esprit sensé, il est clair que l’appartenance à l’Union européenne représente le seul recours pour la Roumanie. Certes, l’UE n’a pas été formidablement efficace ou vigilante, bloquée elle-même dans sa bureaucratie spécifique (les enquêtes de l'OLAF en Roumanie n’ont jamais abouti, que je sache). Sur les réseaux sociaux, les controverses entre Roumains portent sur des comparaisons consolatrices avec d’autres Etats mafieux - en Afrique, en Amérique du Sud, dans les pays de l’Est. Mais faut-il les évoquer pour se rassurer? Cela ne mène qu'à l'indifférence, à la complaisance et à l'acceptation, et cela ne fait que ruiner complètement le pays. Je trouve détestable ce réflexe de se dédouaner en cherchant ailleurs des exemples atténuants. Bien sûr, on peut toujours trouver pire si l'on regarde autour de soi (parfois pas trop loin), tout est une question de degrés, mais ce n'est pas ainsi que l'on avance quand on est vraiment en retard..Et la Roumanie est en retard, historiquement parlant, elle n'a que cent ans d'Etat moderne (lequel n'aurait pas été possible sans les grandes Puissances), et dont les deux tiers représentent un régime totalitaire et un simulacre de démocratie post-communiste. 

Depuis que j'ai quitté la Roumanie, il ne m'a jamais été aisé d’être Roumaine. Je n’ai pas eu non plus un motif de joie (sauf à l'adhésion en 2007), et je finirai sans doute ma vie avec ce sentiment de tristesse. Presque trente ans se sont écoulés, j’ai de la mémoire et un parcours qui témoigne. Néanmoins, je dois m’efforcer de bien séparer les choses. Mon fils unique continue sa belle ascension professionnelle dans le pays où, si vous avez de la consistance, vous pouvez toujours en faire quelque chose et trouver une bonne réponse à votre besoin d’épanouissement. Je le dis et je l'écris: il n’aurait pu arriver à rien de semblable en Roumanie, ni en France. Ma petite-fille unique américaine aura douze ans en janvier. Nous avons décidé ensemble qu’à cet âge je pouvais lui enseigner la langue de son père, comme une langue étrangère, avec méthode. Je m’y suis mise depuis quelques semaines : je conçois la leçon, je la rédige en couleurs sur mon ordinateur et l’envoie par e-mail deux-trois jours avant le weekend, afin qu’elle l’ait sous les yeux à l’écran, quand nous travaillons via Skype. J’essaye de transmettre le roumain. Certains y verront un geste de patriotisme, c’est possible, mais moi, je n’aime pas les mots ronflants et démonétisés par l’utilisation excessive. Sans parler du fait que je me rappellerai toujours l’hostilité profonde dans les yeux bleus froids du conseil juridique du Rectorat de ma ville, un ex-agent de la Securitate, qui m'a traitée d’« ennemie du peuple » à mon retour avec un Doctorat français. C’est à ce moment-là que j’ai décidé de m’expatrier définitivement, mais comme c'était en 1995 et non en 2007, cela n’a pas été facile du tout. Des centaines de milliers de Britanniques expatriés demandent aujourd'hui à être naturalisés dans les pays européens où ils résident, parce qu’ils souhaitent rester en Europe après le Brexit...J'aime l'Europe, ça, oui. 

Il faut préciser que derrière l’actuelle classe politique roumaine incompétente et mafieuse se retrouve celle d’hier, enfin, le même acabit. Je viens de lire une analyse dont j'ai choisi d'adapter cet extrait qui explique l'ensemble. Le journaliste auteur de l'article est sûrement en mesure de connaître un tas de choses sur les marionnettistes et sur les ficelles.

« La matrice des généraux des Services, les hommes d’affaires, les magistrats et les hauts fonctionnaires d’Etat qui ont été poussés à la retraite, ou qui sont sortis du système suite à des condamnations dérisoires, ou qui ont été sanctionnés pour des grosses affaires avec la complicité d’ex-responsables d’Etat, cette matrice-là existe derrière tous ceux qui, à ce jour, jouent le rôle de libérateurs de la « colonie » de l’influence des impérialistes occidentaux. Ce sont les mêmes qui, il y a 15 ans, ont donné leur accord pour l’adhésion de la Roumanie à l’OTAN et à l’UE, convaincus qu’ils pourraient profiter des avantages de l’intégration, et sans renoncer à leurs privilèges. Et qui ont fait chou blanc. Mais qui feraient tout pour se venger.

A cette couche importante formée d’« ex » démis immédiatement après l’adhésion à l’OTAN, viennent s’ajouter d’autres couches d’hommes politiques, d’officiers, de magistrats, de fonctionnaires, rabotés par la DNA, ou par leurs propres structures, parce qu’ils ont fraternisé avec ceux qui avaient commis des infractions, ou parce qu’ils en ont commis à leur tour. A ceux-là s’ajoutent maintenant toutes les espèces de mécontents, ceux qui ont raté une fonction, ceux qui ont vu un proche ou une amante inquiétés pour des affaires illégales, ou ceux qui ont été réellement des victimes innocentes des luttes de pouvoir ou des abus.

Le nombre de ceux qui ont été évincés de la politique et des institutions pendant ces 12 dernières années, le nombre de ceux qui sont effectivement affectés par la lutte anticorruption, est énorme. Les réseaux d’influence et d’affaires, qui les ont soutenus et qu’ils ont soutenus, sont si complexes qu’il s’est créé une masse critique d’opposants à toutes les institutions et à tous les gens qui continuent d’assumer le maintien de la direction stratégique.

C’est sur cette armée invisible et silencieuse, mais très influente par les relations personnelles que ses membres ont gardées à l’intérieur des institutions où ils avaient travaillé, que s’appuient les partis PSD et ALDE et d’autres politiciens qui souhaitent que Dragnea et Tariceanu gagnent la partie contre l’Etat de droit. L’avantage de ce groupe hétérogène composé d’anciens ennemis, de chasseurs et de gibier, c'est qu’il ne nécessite pas de coordination, ni de demande explicite. Ils agissent tous de manière autonome, comme un réseau de neurones, contre ceux qu’ils jugent coupables de leur chute. Et les effets cumulés de leurs actions se font sentir ». (Voir l'article d'origine

19/10/2018

Enjeux

 
Carmen Lopez is feeling worried.
 
8 mins · 
 

(Mon adaptation de l'article roumain)
La République Orientale Roumaine. Nous nous taisons et nous acceptons?

Si nous regardons notre histoire, nous devons reconnaître que le pays ne s’est jamais trouvé dans un système plus sûr et plus prospère qu’à présent –que cela nous plaise ou non, l’UE et l’OTAN sont les repères les plus importants de ce territoire. Certes, tout n’est pas parfait, mais c’est incomparablement mieux que dans le passé. Et pourtant, voici ce que font nos dirigeants, après avoir compris qu’en démocratie les voleurs allaient en prison, quel que fût leur statut. Si au début nous croyions que le gang au pouvoir n’était qu’un accident stupide, nous constatons qu’il est beaucoup plus que ça. Depuis deux ans, la Roumanie est en train de s’engager sur une autre voie que l’UE. Les principes, mais aussi les valeurs et les attitudes pro-européennes ont été remplacées par la lutte contre la justice. A cela il faudra ajouter le populisme visant une population moins éduquée, voire stupide. Par-dessus tout, une économie à la dérive : pas d’investissements dans les infrastructures, pas de vision pour l’innovation, l’agriculture ou la santé, et le plus réduit PIB du monde civilisé alloué à l’éducation (2,93%).

Mais cela n’était que la première étape de l’abjection socialiste. Depuis une semaine, nous changeons brutalement de direction : de l’UE vers l’Orient. C’est la deuxième étape. Détrompons-nous : la visite de la Première ministre en Orient n’a pas été préparée pendant une ou deux semaines. Nous avons affaire ici à de vraies négociations parallèles, à des promesses faites en secret, à des intérêts majeurs pour faire de la Roumanie une tête de pont de l’Orient en Europe. Ils se gardent bien de prononcer le nom de la Russie, ils savent que même le plus affamé des retraités ne pourrait l’accepter. (…) Mais s’ils ne peuvent pas évoquer directement l’agenda de Poutine, ils peuvent raccorder la Roumanie au cordon sanitaire rêvé par celui-ci, et qui commence en Iran et finit, à présent, à Istanbul. Bientôt, la Bulgarie tombera elle aussi dans ce jeu (elle est dirigée par des pro-Russes), et, comme les Roumains, les Bulgares entendront que l’adhésion à l’UE est une sorte de colonisation, et que la Bulgarie appartient aux Bulgares, et ça en plus du refrain sur la « non-ingérence dans les affaires internes ».

C’est pourquoi, dans la bonne tradition roumaine de la diplomatie de la flatterie calculée, les nôtres se sont rendus en Orient, là où les droits de l’homme n’existent qu’en théorie, là où la justice est une sorte de jus primae noctis, en fonction des intérêts, des caprices et de l’abjection des dirigeants. Quand ? Eh bien, au moment même où les relations de leur principal allié et garant de la sécurité de la Roumanie -les Etats-Unis- ne sont pas au beau fixe ni avec la Turquie, ni avec l’Arabie Saoudite, ni avec la Chine. Comment ? Eh bien, en refusant des fonds européens non-remboursables en faveurs d’étranges partenariats. Nous avons des fonds européens pour l’autoroute Iasi -Tg. Mures, mais nous cherchons des investisseurs chinois ; nous avons des fonds européens pour des hôpitaux régionaux, mais nous prions Erdogan de les construire, nous avons des fonds européens pour les Transports, mais nous annonçons avec emphase que les Arabes viendront avec du cash pour dévier le cours du Danube vers Bucarest… L’idée, c’est de se débarrasser de cette UE qui nous demande de respecter la loi et bien d’autres aspects que nos dirigeants n’ont jamais respectés.

Il ne s’agit plus ici d’une mauvaise conception de l’économie, mais d’un masque hypocrite posé sur le visage de la géopolitique. Pratiquement, dans cette deuxième étape, le nouveau pouvoir socialiste de Bucarest compte sur le développement d’un autre axe que celui officiel depuis le 1er janvier 2007, date de notre adhésion à l’UE : la Russie, l’Orient, la Chine sont importants dans la mesure où ils nous permettent de sortir du club de ceux qui nous demandent de respecter l’Etat de droit. Nous nous souvenons bien, Ceausescu avait procédé de la même manière – son propre mouvement de non-alignement, dérisoire, oui, mais un non-alignement.(…) Quatre décennies et demie plus tard, un autre recalé de l’histoire, celui-ci aux dents pourris et originaire de Teleorman, tremble à l’idée de faire de la prison et se convertit. L’enjeu est plus grave qu’il n’en a l’air. Le pitoyable ministre de la justice, ou l’Avocat du peuple, qui a besoin de payer les traites de sa maison, ou la Première ministre d’une sottise notoire, ce ne sont que des marionnettes, sans colonne vertébrale. Il faut comprendre que ce qui se fait en ce moment est une tentative de changement historique de direction : Dragnea [le leader du PSD au pouvoir] est en train d’offrir le pays à l’Orient, de peur qu’en démocratie les voleurs n'aillent en prison. Et si nous acceptons, et si nous laissons faire, nos enfants naîtront muets et sots, et auront des dents pourris !

 
NEWSWEEK.RO
 
Dacă te uiți un pic în istorie, vezi că niciodată țara asta nu s-a aflat într-un sistem mai prosper și mai sigur ca acum – ne place sau nu, pentru noi cel puțin, Uniunea Europeană și NATO sunt reperele cele mai importante ale…

22/08/2018

Bucarest, le 10 août

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(Mes photos- La transmission en direct)

Dans la note antérieure, plusieurs commentaires m’appartenant envoient à des liens sur ma page Facebook, au sujet de la manifestation du 10 août dernier à Bucarest. Une amie vient de m’envoyer, par la poste, l’article paru dans Le Figaro le 18 août, et auquel je me réfère dans mon dernier commentaire. Il est signé par un intellectuel roumain, Alexandru Calinescu, Professeur de littérature française à l’Université d’Iasi. L’article résume de manière claire pourquoi ce qui se passe à Bucarest est bien plus grave que ce qui focalise l’attention des médias européens à Varsovie ou à Budapest, car l’homme malade de l’Europe, ce n’est pas la Pologne ou la Hongrie, mais la Roumanie. J’en ai choisi quelques extraits: 

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