03/04/2022
Boutcha
(Mes photos -Discours du Président américain en Pologne, le 26 mars)
Ce dimanche, le 3 avril 2022, les informations du journal télévisé sont accompagnées d'images insoutenables, abominables. Des civils abattus dans la rue ou dans leur voiture, des cadavres qui jonchent le sol. Près de 300 personnes ont été enterrées dans des fosses communes, toutes ces personnes ayant été abattues, tuées d’une balle à l’arrière de la tête, affirme le maire de la ville. "Un massacre délibéré", déclarent les autorités ukrainiennes. Des crimes de guerre. Les Russes ne respectent aucune règle. Des atrocités qui ne permettent plus maintenant quelque interprétation ou justification que ce soit. Quelles négociations avec les terroristes ? Avec ce nouveau Daesh ?
Pendant les deux guerres mondiales, et aussi pendant la troisième (la guerre froide), nous avons eu en général des informations après le déroulement des événements, ce qui fait que nous n’avons pas pu mesurer l’étendue de l’horreur au présent, pendant qu’elle était en train de s’accomplir. C’est bien ultérieurement que la mémoire a été réactivée, que les témoignages ont commencé à être entendus et diffusés, que des procès ont eu lieu.
Mais aujourd'hui, les moyens technologiques de la communication font que tout le monde est informé presque en temps réel de ce qui se passe. Nul ne pourrait y trouver une justification, à part celle de sa propre conscience défaillante. Ce qui se passe est inadmissible, irrationnel, indigne de l'humain.
« L’homme est inacceptable »
« L’espoir est la forme normale du délire »
« Je me permets de prier pour vous. » - « Je le veux bien. Mais qui vous écoutera ? »
(E.M.Cioran, Ecartèlement)
A propos d’espoir, au sens spirituel, puisque nous voilà à quelques jours des fêtes pascales. Personnellement, je me suis décidée à faire une grève spirituelle symbolique : les passer sous silence, ne pas envoyer de vœux, ne pas réagir sur Facebook aux publications avec des lapins, des fleurs, des œufs, des Jésus, des prières, des messages dégoulinant de bons sentiments conventionnels et creux. Seule ma famille très proche, c’est-à-dire le premier cercle, fera exception (nous vivons dans des pays et sur des continents différents, nous nous verrons en appel vidéo pour nous souhaiter une bonne santé). Ma tristesse et ma révolte sont incommensurables, et elles n’ont rien en commun avec les considérations froides et intelligentes du philosophe français qui apparaît d’habitude le dimanche soir sur une chaîne d’information…
14:54 Publié dans Actualités, Enjeux, Evénement, information, Presse, Publié sur Facebook, RO-EU-USA/Coopération | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : boutcha, ukraine, massacre, crimes de guerre | Facebook | | Imprimer
24/03/2022
Un mois de guerre (un aperçu de ma page Facebook)
(Mes photos -L'équinoxe à ma fenêtre)
Le 21 mars Another day in Paradise
(C'est le titre d'un film, violent d'ailleurs, si je me souviens bien..)
Le 10 mars
(Donald Tusk sur Twitter) La dépoutinisation de l'Occident est nécessaire. Poutine a créé un large réseau d'alliés et d'idiots utiles, en Europe et en Amérique. Conscients ou non, sans le vouloir ou pour de l'argent, ceux-ci soutiennent ses idées et ses actions.. (Donald Tusk cite juste quelques noms, mais il y en a beaucoup..)
(Mon commentaire) Il se réfère à l'Occident, mais nous savons bien que le réseau d'alliés et d'idiots utiles de Poutine s'étend aussi à l'Est. Qu'il s'agisse de personnages politiques, ou d'individus ordinaires.
Le 13 mars
L'année dernière, jour pour jour, ma première dose de vaccin.. Comme je le dis en commentaire (ce sont mes commentaires à la publication d'origine), je n'aurais pas pu aller aux États-Unis. Aujourd'hui, je lis les mêmes explications sur la guerre en Ukraine que sur la pandémie et les vaccins.. Certaines gens sont cohérents dans leur perception complotiste du monde, ils sont intéressants à observer, comme étude psycho-sociologique. On assiste à un phénomène appelé la 'polarisation de la connaissance', qui n'est pas un problème de technologie, de sources d'information, mais un problème humain -comment nous pensons, quelles sont nos valeurs, ce qu'est la vérité pour nous..
Le 16 mars
Aujourd'hui, j’ai un désir d’Amérique (Photo New York, Crédit Claudiu Nedelea)
(Mon commentaire) Et il y a un tel antiaméricanisme dans la complaisance/la sympathie à l'égard du dictateur russe, dans la rationalisation des différents biais cognitifs de chacun ! Ce qui me désole le plus, c'est quand je le rencontre chez des têtes bien meublées..
(Reply) Les Français ont toujours été plus socialistes qu'il le faudrait... surtout les têtes bien meublées.
(Mon commentaire) Oui, en effet, je le découvrais avec tristesse à mon arrivée, il y a voici 30 ans. Avec le temps, j'ai appris à m'autocensurer (ce n'était pas difficile, vu d'où je venais..., mais par rapport à des relations, afin de garder un minimum d'amis..)
Le 22 mars (deux vidéos sur la promenade des Anglais)
Je marche en réfléchissant, bien sûr. Et pour évacuer la nausée que vous provoque l'éternelle hypocrisie. J'entendais ce matin les analystes mettre de l'eau dans leur vin, pourquoi les grandes compagnies implantées en Russie ne pourraient partir. L'éthique, ça a des limites..
(Mon commentaire) Je pense à un commentaire en français, que je viens de lire (mais l'auteur n'est pas Français, bien sûr.., il est Roumain et Canadien) et qui rappelle un fait bien connu: la Russie n'a jamais respecté une alliance ou des conditions (si l'on regarde l'Histoire). Et aussi pourquoi il est illusoire d'espérer que le peuple russe va faire une sorte de révolution pour renverser le 'nain atomique' (le surnom qui circule en roumain et qui a une consonance plus drôle: 'piticul atomic'). Le peuple russe n'a jamais fait l'expérience de la démocratie, aussi loin que l'on remonte dans son histoire, et il vaut mieux éviter de le jauger à l'aune des valeurs occidentales (voir le spectacle en soutien du président). Et aussi, à propos d'histoire: la russophobie, pour un Roumain, n'est pas une insulte, mais une preuve de santé mentale.
(Mon commentaire) The atomic dwarf ou bien Poutler
Le 23 mars
Zélénsky s’adresse aux parlementaires français (Photo )
(Mon commentaire) A l'intention des compagnies françaises présentes en Russie, il a dit "Nous savons que les valeurs valent plus que les bénéfices"..
(Mon commentaire) J'arrête de lire les commentaires des internautes français..
Le 23 mars
Tweet de Dmytro Kuleba, Gouvernement ukrainien : Renault refuses to pull out of Russia. Not that it should surprise anyone when Renault supports a brutal war of aggression in Europe. But mistakes must come with a price, especially when repeated. I call on customers and businesses around the globe to boycott Group Renault.
(Mon commentaire) Résultat : Renault annonce la suspension de ses activités en Russie (Le Monde, Les Echos..)
Le 24 mars
Vidéo de la Playlist Guerre en Ukraine (Le Monde) « Cela fait un mois que l'armée russe a envahi l'Ukraine et que la guerre ravage le pays. Le président Volodymyr Zelensky a appelé le monde entier à manifester contre la guerre, « depuis [vos] bureaux, maisons, écoles et universités ».
(Mon commentaire) Je partage sans lire au-delà d'une dizaine de commentaires, je ne résiste pas, c'est un désastre, bien pire que chez les internautes roumains..
17:18 Publié dans Actualités, Enjeux, Evénement, information, Publié sur Facebook, RO-EU-USA/Coopération, Web | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : page facebook, guerre en ukraine | Facebook | | Imprimer
28/02/2022
La guerre aux portes de l'Europe
(Mes photos -Couleurs symboliques)
Ce qui me touche particulièrement, en suivant les informations, c'est la responsabilité tragique que doit ressentir un président qui défend son pays encerclé et attaqué. Et sa solitude aussi, car l'Alliance atlantique ne peut intervenir, en tant que telle. Au-delà de toutes les explications historiques et politiques qui sont avancées ces jours-ci, je vois le cas psychiatrique du décideur de cette guerre, sa guerre. Il vient d'ordonner à son chef d'état-major et à son ministre de la Défense de "mettre les forces de dissuasion de l'armée russe en régime spécial d'alerte au combat", et on comprend ce que cela signifie.. Un historien roumain, Madalin Hodor, publie dans Revista 22 l'article "In capul lui Vladimir Putin" (Dans la tête de Poutine) et il explique que le leader russe ne voudrait pas réécrire l'histoire, mais plutôt lui apporter des corrections, car il n'aimerait pas comment les choses se sont passées. Il me semble que ce désir de vouloir corriger l'histoire est le délire messianique du président orthodoxe, ancien agent du KGB, un délire qui a dû évoluer sensiblement ces dernières années. Comme souvent, un délire peut être structuré, et c'est son cas.
Quatre jours après l'invasion russe en Ukraine, un quotidien américain (The Newyorker) remarque une évidence: la stratégie de l'Ouest aurait donné à Poutine une raison pour attaquer, mais maintenant il est clair qu'il en avait depuis longtemps l'intention, peu importe ce qu'auraient fait les Etats-Unis et l'Europe. Pendant vingt ans, des hommes politiques, des chefs d'Etat ont cultivé Poutine, en voyant en lui un facteur de stabilité en Russie. Cela s'est avéré faux, car l'histoire ne ment pas, et elle se répète, comme on le constate.
Aujourd'hui, on a l'occasion de voir concrètement que les deux seules réalisations de la Roumanie, depuis la chute du Mur, sont l'appartenance à l'UE et à L'OTAN.
Update. 7 mars
Douze jours après, la situation en Ukraine s'aggrave, des villes sont tombées ou sont encerclées, l'expansion russe se poursuit. La Russie ouvre des couloirs humanitaires vers... la Russie et la Biélorussie, une manière de déporter les gens, de s'en servir comme des boucliers humains. Le président français a dénoncé "le cynisme moral et politique de V.Poutine", tout en affirmant la volonté de continuer à "mener la pression diplomatique pour que la guerre s'arrête".
Hier soir, j'étais en train de regarder un débat, et c'est avec tristesse que je constatais, pour la énième fois, que certains intellectuels, hommes politiques, n'arrivaient toujours pas à comprendre ce que le régime soviétique avait représenté dans les pays de l'Est. Autrement, ils auraient compris pourquoi ces pays avaient demandé à adhérer à l'OTAN dès la fin des années '90, ainsi qu'à l'UE. Et je sais pourquoi je ne lirais pas de poèmes d'Aragon, le stalinien (j'y ai été obligée, à l'époque où j'étudiais la littérature française, à l'université de Bucarest). Parce que même en ce moment, où les bombes russes tombent sur un Etat indépendant, au coeur de l'Europe, il existe des intellectuels et des hommes politiques qui s'efforcent de nuancer, en affirmant que nous n'avons pas bien su approcher Monsieur Poutine...
08:48 Publié dans Actualités, Enjeux, Evénement, Publié sur Facebook, RO-EU-USA/Coopération | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : ukraine, russie, poutine, guerre, ue, otan, roumanie | Facebook | | Imprimer
08/02/2022
Illogique et impossible
(Mes photos - Le Danube à Galati, août 2005)
En juillet 2020, en pleine pandémie et au lendemain du sommet historique de l’UE, j’écrivais ici la note « Ce pactole européen qui va partir en fumée ». Je rappelle ce texte d‘il y a deux ans, car la situation en Roumanie ayant empiré après des mois de crise politique, de luttes internes, de coups bas entre les leaders des partis au gouvernement, de compromis lamentables et inefficaces, il ne fait aucun doute que le pactole européen (le fameux plan de résilience et de redressement) va partir en fumée. Je disais que les bonnes intentions exprimées par le Président Iohannis ne pouvaient pas être mises en doute (ne serait-ce que parce que c'est le Président qui parle) : les presque 80 milliards d’euros obtenus par la Roumanie seraient destinés à des travaux d’infrastructure, de modernisation de systèmes publics, à la construction d’hôpitaux et d’écoles. Ce serait le plan de relance économique post-pandémie.
« C’est un jour important pour la Roumanie, un jour important pour le projet européen, et nous allons avancer, cet argent devra être utilisé à la reconstruction de la Roumanie. »
Mais c'est une simple déclaration officielle qui n’engage personne. On connaît la réalité: le pays est le résultat de trente années de pillage, de corruption et d’incompétence institutionnalisée, d'émigration. Avec un Etat de droit qui n’en est pas un, avec un maillage clientéliste au niveau de toutes les structures administratives, avec l’argent public siphonné par les réseaux mafieux et les intérêts des partis politiques, il est tout simplement illogique de croire qu'un renversement de situation serait possible. Autrement dit, nous avons besoin d’une stratégie, ce que la Roumanie n’a jamais eu (enfin, à part la l’édification du communisme...). Il est vrai que l’UE traverse la plus grande crise depuis sa création, et que l’accord trouvé après d’âpres négociations est unique car, pour la première fois dans son histoire, l’UE s’endette collectivement : une enveloppe globale de 750 milliards d’euros, dont 390 non-remboursables et 360 de prêts. Mais souvenons-nous que la Roumanie se distingue entre tous par la plus faible capacité d’absorption des fonds européens. Elle n’avance pas de projets pour accéder aux fonds, son système mafieux spécifique fait que les responsables politiques, administratifs, etc., ont leurs propres business et des contrats avec l’Etat. Alors, faire de grands projets d’investissements publics, d’infrastructure, n’intéresse personne. Tout se concentre autour du jeu politique qui doit profiter au maximum au système mafieux complexe. Celui-ci ne pourra être démantelé, c’est impossible. Il peut exister, par-ci par-là, dans tel ou tel ministère, de rares personnes honnêtes ayant un cursus international, mais en vérité, elles sont impuissantes, et finalement elles seront remplacées ou elles jetteront l’éponge. Le manque de compétences est un aspect presque tabou en Roumanie, normalement on devrait en avoir honte, si l’on est lucide. Et quand on est compétent, on est broyé par le système qui est le plus fort, cela va de soi. Le plus triste, c’est la fraude intellectuelle qui prospère justement parce que les compétences réelles sont absentes. Bien entendu, la Roumanie va se débrouiller pour monter certains projets et accéder à une partie des fonds disponibles dès l’automne (pour le plan de relance post-pandémie). Que va-t-elle en faire?
En principe, cela devra se passer d’après un schéma bien connu, comme je l’écrivais dans une note en 2008 (le fait que l’on se trouve, plus de douze ans après, dans un plus grand désastre, ne changera pas le mécanisme, peut-être que les 5% de commission deviendront 10%). « La Mafia des fonds européens vole l'argent des agriculteurs : l’accès aux fonds européens est filtré par une Mafia composée justement de fonctionnaires habilités à aider les investisseurs dans le montage des projets et dans l'obtention des subventions. Ces mafieux exigent un pourcentage de 5% des fonds débloqués. Ils proposent "du conseil" dans la rédaction et la validation du dossier. Voici plus loin le cas d'un haut fonctionnaire de l'Agence des Paiements et des Interventions pour les Agriculteurs (APIA), institution qui joue un rôle déterminant dans l'approche des fonds européens. (...) APIA est une institution mammouth qui comprend une armée de fonctionnaires grassement payés (des salaires en milliers d'euros) et qui n'ont toujours pas réussi à faire les démarches nécessaires pour recevoir les fonds UE (...).»
Dans les premières années qui ont suivi son adhésion, la Roumanie a produit une mafia des fonds européens, et des sommes colossales ont été détournées. (Dans les Archives de ce blog on pourra trouver plusieurs articles consacrés au sujet inépuisable des fonds européens, en tapant un mot-clé dans la case Rechercher, par exemple "fonds UE".) Avec le temps, l’UE a mis en place des mécanismes de vérification qui ont fait diminuer l’intérêt pour les programmes européens financés, étant donné qu'on ne pouvait plus frauder aussi facilement. Alors, on s’est tourné vers la combine des partenariats bilatéraux, tout le monde y étant gagnant, moins le pays dans l'ensemble, qui, lui, a continué de s’enfoncer, moins les citoyens ordinaires qui, eux, ont trouvé la solution de l’émigration.
16:15 Publié dans Actualités, Emploi, Enjeux, Presse, RO-EU-USA/Coopération, Voyage, Web | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : roumanie, pnrr, fonds ue, crise politique | Facebook | | Imprimer