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24/07/2021

Persévérer (dans son être)

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(Mes photos - Des cactus fleuris )

Sur France Culture, j’écoute le récit d’une survivante des camps, née en Roumanie, d’origine hongroise. C’est dans un livre fait de rencontres entre des survivants des camps et des jeunes d'aujourd'hui, un ouvrage témoin de cette ultime transmission (Karine Sicard-Bouvatier, Déportés, leur ultime transmission, Editions La Martinière, 2021). A la question comment elle a fait pour tenir, la survivante de 92 ans répond simplement que c’est par la phrase de Cervantès : « Je vis du désir que j’ai pour vivre ». Elle explique ensuite que l’indifférence est ce qu’il y a de pire, et qu’il faut, par-dessus tout, aimer la vie.

J’ai donc débuté ma journée avec cette phrase de Cervantès, en me rappelant que l’on pouvait tomber amoureux d’une phrase. Et puis, il y a les synchronicités - des coïncidences, des événements reliés par hasard d'une manière significative, mais que seul le Sujet peut relier dans son cadre spatio-temporel pour en construire une représentation significative. C’est le Sujet qui donne une interprétation à ce qui semble être une coïncidence. La veille de l’émission sur France Culture, j’ai repéré, dans mon porte-monnaie, une pièce de 10 centimes avec le profil de Cervantès émise en 2003. Je l’ai sortie du circuit et mise de côté. D'un coup, tout est remonté à la surface avec la force qu’a toujours le souvenir lié à l’émotion, surtout quand l’émotion est négative, car l’année 2003 avait été peut-être la plus compliquée pour moi (travail, remboursement des crédits). En même temps, c’est pendant cet été caniculaire que mon esprit m’avait sauvée vraiment, en me faisant acheter deux volumes de Spinoza chez Virgin Mégastore. L’une de mes plus belles expériences intellectuelles et spirituelles.

Comme dit Antonio Damasio, le corps, le cerveau et l’esprit sont les manifestations d’un organisme unique, ils sont inséparables dans les conditions normales de fonctionnement. Maintenant, on connait le mécanisme : si un contenu émotionnel trop fort ne pourra pas être « métabolisé » (ne pourra pas arriver au cortex), il restera bloqué dans le cerveau limbique. C’est-à-dire que les sensations et les émotions resteront dissociées du cortex frontal (d’où le traumatisme possible). J’ai d’ailleurs décrit le mécanisme du syndrome post-traumatique dans la note de mai de CEFRO : pour que l’information soit présentée au cortex sans le submerger, l’intensité des réactions émotionnelles doit être abaissée.

C’est exactement ce que la lecture du philosophe avait fait dans mon cas: elle avait abaissé l’énorme intensité émotionnelle. J’ai recherché la trace de Spinoza dans les Archives de ce blog, et j’ai trouvé, parmi d’autres, l’année 2005. C’est là où j’explique à ma manière, la révolte l’emportant sur la réserve, comment Spinoza était intervenu. (Intégration –modèle français). Je suis tombée aussi sur une note de 2013, Good bye... ! Welcome...!, à propos d'anniversaire (ce moment particulier où les souvenirs se mobilisent pour nous envahir) contenant un extrait d'un roman de James Lee Burke où il est question du karma. Et puisque juillet est toujours lié au moment où je suis arrivée en France, la note Anniversaire (30) de l’année dernière. 

 

 

25/06/2021

Le 26 ème anniversaire

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(Mes photos- La Chapelle du Saint-Suaire, Vieux-Nice
 
Il est assez rare que je choisisse Magnan pour mes trajets quotidiens, le quartier où se trouvent la Faculté des lettres de l'Université de Nice (devenue récemment l'Université Côte d'Azur), la Bibliothèque où j'ai travaillé comme doctorante, le Campus Carlone avec ses résidences et son restaurant. En fait, j'y vais une fois par an, avant la date anniversaire de ma Thèse. L'année dernière, la Faculté était fermée à cause du confinement, et il y a deux jours, j'y suis montée sans grand espoir de revoir ma Salle. Mais, surprise, les locaux étaient ouverts, et, après m'être enregistrée à l'Accueil, j'ai pu retrouver des lieux qui m'étaient familiers (la Salle du Conseil - la soutenance de quatre heures- et la Salle des Professeurs - le pot de la fin). J'ai pris quelques photos et j'envoie au texte écrit en 2020, pour le quart de siècle de ma Thèse, car je n'ai rien d'autre à ajouter. Heureusement, ce blog, qui est un témoignage, possède des Archives qui m'aident à rechercher dans les souvenirs et les réflexions des années précédentes. Disons que j'externalise ma mémoire selon le principe qu'un psychologue de Harvard appelle "transactive memory". Sauf que ce n'est pas exactement comme lorsque vous consultez un moteur de recherche, car un voyage dans votre propre passé n'est jamais neutre, de point de vue émotionnel. Ma photo est prise ce matin, dans la glace de l'Office notarial Giletta de Saint-Joseph. 
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11/06/2021

Le Plan

 

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(Mes photos- Perrier- Citron Vert)

 

Le gouvernement roumain devra revoir sa copie, son Plan national de résilience et de relance (PNRR) ayant reçu de la part de la Commission européenne pas mal d’observations. Une simple recherche en ligne nous permet de nous informer: la Roumanie n’a pas évalué les investissements de manière spécifique mais globale, les coûts ne sont pas justifiés, les méthodologies de calcul sont absentes, les informations liées aux différents projets ne sont pas claires, les données et les documents justificatifs sont insuffisants, les montants envoyés par le gouvernement et les documents comptables (en Excel) ne concordent pas... 

J’ai jeté un regard sur le plan roumain et sur le plan français. Bien entendu, le PNRR roumain sera quelque peu différent du PNRR français - question de développement ou de retard. Le plan français, pour lequel la France sollicite un financement de la Facilité pour la reprise et la résilience à hauteur de 40 milliards d'euros, un plan préparé avec l’ensemble des administrations concernées et qui a fait l’objet d’une consultation des parties prenantes, poursuit trois priorités clefs (l’écologie, la compétitivité et la cohésion sociale et territoriale) et comporte neuf composantes : rénovation énergétique ; écologie et biodiversité ; infrastructures et mobilités vertes ; énergies et technologies vertes ; financement des entreprises ; souveraineté technologique et résilience ; mise à niveau numérique de l’Etat, des territoires et des entreprises ; culture ; sauvegarde de l’emploi, jeunes, handicap, formation professionnelle ; recherche, Ségur de la santé/dépendance, cohésion territoriale.  

Le PNRR roumain (29,2 milliards d'euros) est publié sur le site du Ministère pour les investissements et les projets européens, ministère qui est le coordinateur national du processus d’élaboration avec l’ensemble des ministères et aussi le négociateur avec la Commission. Le plan est structuré autour de six domaines : transition vers une économie verte ; transformation digitale ; croissance et développement économique durable ; cohésion sociale et territoriale ; santé et résilience des institutions ; enfants, jeunes, éducation et compétences.

Depuis son entrée dans l’UE en 2007 (mais même avant, quand elle avait le statut des PECOs - pays d’Europe Centrale et Orientale), la Roumanie a bénéficié de fonds structurels et d’autres fonds européens à travers de nombreux programmes (agriculture, transports, formation, communications, etc.). Normalement, on devrait constater que ces fonds ont servi au développement de ces secteurs-là, mais il n’en est rien. Ils ont servi aux prospères affaires personnelles. Au début, l’argent européen était plus facile à détourner parce que les « projets » présentés à la Commission étaient suffisamment démagogiques et ronflants (à cause de ou grâce à la riche expérience d’une idéologie communiste basée sur des évaluations et des rapports imaginaires). Les commissaires européens à l'Elargissement, eux aussi, étaient des bureaucrates parfaits. A un moment donné, l'OLAF (l'Office de la lutte contre la fraude) est entré en scène, mais bizarrement, à chaque fois qu’il venait enquêter en Roumanie, il ne trouvait rien de suspect. Avec le temps, les conditions d’accès aux fonds européens devenant plus précises, la Roumanie a perdu sa motivation pour monter des projets… Ce qui est bien compréhensible. Elle s’est tournée plutôt vers des partenariats bilatéraux, son travail consistant à élaborer des ingénieries financières pour siphonner légalement l’argent de l’Etat.

Il est évident que la Roumanie manque de gens compétents pour réaliser de vrais projets essentiels à son évolution. Elle affiche le plus bas taux d'absorption des fonds européens. Le flou, l’approximatif, le manque de rigueur ont toujours été les caractéristiques des administrations roumaines. Elles sont la conséquence directe du clientélisme et du népotisme, comme critères de sélection partout, et de la corruption. Et cela date d’avant le communisme, car on est aussi aux portes de l’Orient. Je crois que la Roumanie illustre le mieux le syndrome Dunning-Kruger, ou l’effet de sur-confiance, qui est un biais cognitif : pour pouvoir se rendre compte de son incompétence, il faut avoir un minimum de compétence (voici la note de CEFRO qui l’explique http://www.cefro.pro/archive/2016/10/03/le-syndrome-dunni...).  

J’avais l’intention d’aller chercher quelques notes dans les Archives de ce blog et indiquer les liens, mais j’ai renoncé. Je me protège, en évitant, si je peux, de revivre les souvenirs et les émotions liés aux efforts autour du projet de Centre de formation pour lequel je n’avais pas trouvé de soutien institutionnel de la part de la Roumanie (de la France non plus, vu que le projet concernait la formation au bénéfice des cadres roumains). « Chaque pays européen est gestionnaire des fonds qu’il reçoit », me répondaient invariablement les exécutifs européens que je contactais avec persévérance. Finalement, j’ai donné une autre forme au projet initial en créant CEFRO, qui a travaillé entre 2008-2020 comme fournisseur et organisateur de cours pour deux programmes européens d'Education et de formation tout au long de la vie. Mais c’est comme si je réalisais un béret, quoique un joli petit béret, au lieu d’un manteau. En tout cas, les lecteurs de ce blog pourront toujours taper dans la case Rechercher (la version classique du site, pas l’application) un mot-clé : fonds, corruption, projet, programmes, Roumanie, Commission européenne, compétences, fraude, etc. Une multitude de notes s’afficheront. Dix-sept-années et un tableau vivant.

21/05/2021

L'expérience esthétique

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(Mes photos - Objet connecté)

Le dernier numéro de Cerveau & Psycho parle, entre autres, de l’importance des expériences esthétiques pour la santé de notre cerveau. En voici un résumé.

De façon générale, dans un monde où nos ressources attentionnelles sont souvent dépassées par des activités multitâches, des rythmes de vie trop élevés ou un recours trop important aux écrans, notre sensibilité à la beauté risque de s’émousser voire de disparaître. Nous faisons peut-être rarement une expérience esthétique, car cela demande une certaine disponibilité d’esprit, à savoir des ressources cognitives, notre cerveau ayant besoin de place pour traiter les stimuli esthétiques.

Plus la charge cognitive est importante (réviser, consulter le téléphone, regarder les infos etc.), moins il reste de ressources cognitives disponibles, et moins nous faisons  des expériences esthétiques (que nous sommes moins capables d’apprécier). Etre sensible à la beauté est un travail pour notre cerveau, et il faut pour cela lui donner les moyens de le faire. Parfois, la dose de beauté à absorber est trop forte, et le cerveau craque : c’est le syndrome de Stendhal dont sont victimes nombre de touristes japonais visitant le Louvre, et qui font des malaises en voulant ingurgiter trop de merveilles picturales ou structurales en une seule fois.

Parmi les expériences esthétiques, la musique a le pouvoir de modifier l’anatomie et le fonctionnement du cerveau humain, d’une façon qui bénéficie à de nombreuses aptitudes cognitives et socio-affectives. Elle active un vaste réseau cérébral impliquant des structures perceptives, cognitives, motrices et émotionnelles et entraîne la libération de diverses substances, comme la dopamine ou l’ocytocine. Elle a alors de multiples effets positifs, tant sur l’humeur que sur la vie sociale ou les performances sportives. Elle est même utilisée pour stimuler la créativité lors de sessions de groupe en entreprise. Il n’est pas nécessaire d’être un professionnel. La simple écoute musicale allume dans notre cerveau une véritable symphonie neuronale, qui entraîne de multiples retombées positives, et il n’y a que 5% des gens qui n’éprouvent aucun plaisir à écouter -des anhédoniques musicaux

Pour l’immense majorité d’entre nous, la musique est un moyen privilégié pour moduler nos émotions, et cela dès la naissance. L’écoute, et plus encore la pratique musicale stimule le cerveau au-delà du cortex auditif. Elle engage de nombreuses régions impliquées dans l’action, les émotions et l’intellect, qui interagissent pour établir un cercle vertueux cognition-action-émotion. Le son musical chemine d’abord de l’oreille interne jusqu'au tronc cérébral, via les fibres du nerf auditif, puis se dirige vers le lobe temporal, où le cortex auditif primaire (le gyrus de Heschl) est localisé. C’est là que sont réalisées les premières étapes de traitement et d’encodage. L’information est ensuite transférée vers le cortex auditif secondaire et les cortex associatifs, puis vers le cortex préfrontal, qui s’occupe des caractéristiques plus complexes (contour mélodique, intervalle de hauteurs, etc.). Il existe également des connexions entre le cortex auditif et ce que l’on appelle le système de la récompense (incluant plusieurs régions du système limbique), qui crée les réponses émotionnelles à la musique et produit des substances associées au plaisir, comme la dopamine. Lorsque nous expérimentons un moment musical très plaisant, les interactions entre ces régions s’accroissent, les faisceaux qui les relient étant d’autant plus épais que l’on est passionné par la musique et que l’on passe du temps à en écouter.

Le cortex auditif entretient également des connexions privilégiées avec plusieurs régions motrices du cerveau, comme le cortex moteur ou les ganglions de la base et le cervelet. Ce couplage est important pour la synchronisation sensorimotrice, lorsqu'on joue de la musique ou lorsqu'on danse, mais aussi pour la perception des séquences motrices même lorsque aucun mouvement n’est demandé aux auditeurs. Il permet de mieux traiter le rythme et aide à prédire ce qui va suivre -développant des attentes temporelles. Outre son rôle dans la perception de la musique, cette interconnexion des réseaux audio et moteurs pourrait avoir un intérêt thérapeutique : certaines recherches visent à l’exploiter pour aider les patients atteints de la maladie de Parkinson, en diffusant des séquences de sons réguliers pour déclencher ou stabiliser la motricité.

Enfin, la perception et la mémoire musicale activent d’autres structures corticales, dans le lobe occipital (qui joue un rôle dans l’imagerie mentale et les potentielles associations visuelles évoquées par la musique) et le lobe pariétal. Ce dernier intervient dans certaines opérations cognitives, comme le traitement de certaines structures musicales complexes ou inattendues. 

La musique est utilisée dans la prise en charge de la douleur, car dans le cerveau, les deux mécanismes, émotionnel et cognitif, modulent les réactions du système de la douleur. En contrecarrant les émotions négatives qui sont liées à la douleur, par les ressentis positifs qu’elle inspire, elle détourne l’attention de la souffrance physique. Le pouvoir de la musique s’exerce aussi dans bien des situations de la vie quotidienne, souvent à notre insu. La musique peut provoquer aussi un rajeunissement cognitif. Avec l’avancée en âge, on constate une diminution de la flexibilité cognitive - l’aptitude du cerveau à enchaîner des tâches différentes et à traiter des informations contredisant nos connaissances. Les recherches montrent que débuter la pratique d’un instrument (cinq heures /semaine) améliore cette capacité dès le quatrième mois.

Donc, la musique est un moyen privilégié pour moduler le fonctionnement de son cerveau sur bien des aspects. Elle n’est sans doute pas le remède absolu à tous nos maux, mais elle présente des atouts manifestes pour accompagner les défis psychologiques que nous devons relever tout au long de notre vie.

J’écoute beaucoup de musique, sur tous mes appareils, téléphone, ordinateur, radio, lecteur CD.. , que j’utilise en fonction de mes activités. Le dernier objet connecté qui améliore mon quotidien est une adorable petite enceinte JBL Go 2. Elle me permet d’écouter via Bluetooth les titres enregistrés au fil du temps sur Spotify et sur YouTube, c’est plus pratique, car je n’ai plus à allumer l’ordinateur. Dans le désert de ces derniers mois de restrictions, la musique et la lecture ont représenté des soutiens hautement précieux. Mais aussi, dans les brèves promenades autorisées en ville, les fleurs (quand les jardins étaient ouverts), les arbres, le ciel, et la mer (quand l’accès à la Promenade était autorisé).

Dans quelques jours, je m’apprête à accueillir une nouvelle année de ma vie.