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15/10/2014

Vertige et nausée

roumanie, présidentielle, services secrets, soviétisation, livre Anne Applebaum

Update 19.J'aimerais apporter une précision, après avoir lu qu'en ce moment, c'est une autre Roumanie qui est en train d'émerger, pour la première fois depuis 25 ans. Une nouvelle Roumanie, dans laquelle la coopération entre une partie des autorités avec les partenaires stratégiques en matière de justice et contre-espionnage commence à fonctionner, en vue d'un renforcement de l'Etat de droit, une voie cohérente et une perspective décente. Cela me paraît très limpide.. Je comprends que nous devons "cette nouvelle Roumanie" au partenariat stratégique ("on" nous a fait entrer dans l'UE et dans l'OTAN), plutôt qu'à un sursaut de la conscience civique nationale. Il vaudrait mieux que les journalistes emploient des propos moins triomphalistes sur la justice roumaine, lorsqu'on sait que plus de 70% des ex-officiers de la Securitate avaient intégré les structures de la magistrature, quand même.. A la fin d'une note écrite en 2009, je reproduisais les paroles de l'écrivain Herta Müller, Allemande d'origine roumaine, prix Nobel de littérature. Elles sont d'une poignante vérité. Dans ma recherche sur l'Ethos, du temps où je préparais ma Thèse, j'avais trouvé un texte apocryphe, ambigu car poétique, que j'affectionne toujours particulièrement: "Lorsque ce que vous possédez en vous vient de vous-mêmes, cela vous sauvera; si vous n'avez pas cela en vous, que vous ne l'avez pas de vous-mêmes, cela vous fera mourir." 

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Ce matin, j'ai pris quelques minutes pour écouter sur France Culture la journaliste et historienne Anne Applebaum, prix Pulitzer 2004, éditorialiste au Washington Post, spécialiste de l'ex-URSS, auteur d'un livre qui vient de sortir. Elle y analyse la soviétisation de l'Europe de l'est entre 1944-1956, en s'arrêtant à trois pays, l'Allemagne, la Hongrie, la Pologne. La notice de présentation sur le site de la radio précise que "ce livre est dédié par son auteur aux européens de l'est qui ont refusé de vivre dans le mensonge", et finit par la question rhétorique: "une dédicace à conjuguer aussi au présent?". J'ai pris l'émission en route, là où la journaliste faisait référence aux aspects du totalitarisme soviétique en Pologne et en Hongrie jusqu'en '56, au mouvement de la Résistance, et à l'après '56, quand les vraies valeurs sont revenues. Ce sont celles qui ont résisté après 1989, a-t-elle souligné, en remarquant aussi que les partis des autres pays de l'est avaient évolué différemment.

Ce qui m'a fait réfléchir à la Roumanie, où je ne vois pas quelles vraies valeurs seraient revenues après '56. C'est le pays où le totalitarisme soviétique a trouvé une prise presque définitive: peu d'opposition, un terrain fait de passivité et surtout d'opportunisme, idéal pour encourager la délation, et pour faire administrer la peur et la méfiance. L'histoire d'avant, je la connais indirectement, par des témoignages de ma famille, celle d'après, directement.. Aujourd'hui, en Roumanie, il me semble évident qu'il n'existe pas de réelle rupture avec cette époque-là, mais une solide continuation de fond, et qui, de temps en temps, apparaît au grand jour. Une fois de plus, on constate que ce pays est dirigé par les Services - non pas défendu, ce qui ne serait que leur rôle, mais dirigé, dans l'acception la plus politique du terme. Ce qui se passe maintenant, à quelques jours de la présidentielle, me donne le vertige et la nausée. Le premier-ministre candidat qui aurait été un agent infiltré quand il était magistrat (ce qui est anticonstitutionnel), le commandant (en activité) des Services Externes qui démissionne pour se porter candidat.. A-t-on vu ça ailleurs, sauf dans la Russie de Poutine? Les autres patriotes qui se présentent sont ejusdem farinae.

Néanmoins, comme depuis plus de vingt ans, j'exercerai mon droit de vote dans l'une des nombreuses sections de la diaspora. Occasion de plus pour me rappeler que la diaspora roumaine continue à grossir ses rangs. Une diaspora qui, évidemment, peut être divisée, infiltrée, intéressée, manipulée..Personnellement, j'ai fait dès le début le choix de ne pas la fréquenter (ce que je conseille à mon fils, là où il vit), et cette méfiance est justifiée, je la dois à la connaissance directe que j'ai de notre histoire, et au présent. 

03/10/2014

Enjeux

présidentielles, Roumanie, corruption, licences Microsoft, investigation, fbi
(Photo credit Claudiu: "Visit to the apple orchard and cut dragon fruit").
 
En lisant cet article qui nous livre le bien fondé scientifique d'une constatation que nous pouvons faire à chaque moment de notre vie, j'ai pensé, automatiquement, à la campagne présidentielle qui débute maintenant en Roumanie. Depuis 25 ans, le pays profite de la liberté d'expression en démocratie pour afficher fièrement sa tradition religieuse, inséparable de la vie politique, directement ou indirectement (d'ailleurs, nos politiques la font figurer sur leur CV). Bien entendu, aucun lien de cause à effet avec la morale et des valeurs indispensables, telle l'intégrité. 
Si vous voulez vous tenir au courant de ce qui se passe réellement dans ce pays de l'UE, comment il va, il faudra lire quand même la presse, car autrement, vous n'avez aucun écho, aucune réaction de la part de la société civile, des citoyens (font exception les gesticulations patriotardes et complexées de type "je suis fier d'être Roumain", "mon magnifique pays", etc.). Les Roumains qui écrivent sur Facebook sont ou complaisants, ou indifférents, ou prudents.
Un article récent remarque l'énorme différence avec les protestataires qui occupent la place à Hong Kong, et qui ont la sympathie du monde entier (du monde libre, ça s'entend) parce qu'ils n'acceptent pas la domination d'une Beijing profondément corrompue. Et c'est exactement vers ce régime, observe l'auteur, que va la sympathie du gouvernement roumain. Rien d'étonnant, puisque nous nous sommes adaptés à la corruption et à la décadence morale, dit l'article. Il y a quelques jours, on pouvait apprendre qu'une compagnie payait des SDF pour créer des sociétés fictives (bon, les sociétés-écrans ne sont pas une invention roumaine, mais n'empêche qu'elle a vite été adoptée et adaptée). Le scandale le plus intéressant en date, et qui tombe à pic dans la campagne, semble être celui lié aux licences Microsoft. Cette fois-ci, comme l'investigation a démarré aux US, nous sommes obligés de démontrer que nous ne profitons pas de la couverture de l'OTAN pour protéger nos corrompus..

 

26/09/2014

Narrative for Europe

 
001fontaine thiole.jpg
(Mes photos: Jardin Thiole)
 
Europe needs citizens to raise their voice, to share their stories and their concerns. Together, these make the story of what it means to be a European in the 21st century.
How do you get involved?
I left a comment under my full name Carmen Lopez. 

20/09/2014

Le vrai travail ne paye pas

crime organisé,milliards,business légal,travail,restaurant traditionnel(Mes photos: Ginkgo biloba, l'Arbre aux mille écus)

Lorsqu'on on réfléchit bien, on constate que le vrai travail ne paye pas, tandis que l'autre, si. La réalité foisonne d'exemples, mais je pense à deux domaines - l'un fonctionne au grand jour, l'autre dans l'ombre. Pour ce qui est du premier, c'est facile, il est correctement encadré par des lois, traités, conventions, bref, par tout l'arsenal démocratique émanant du consentement des citoyens. Cet article explique comment les commissaires européens, très bien payés par les taxes publiques, sont nommés sur des critères exclusivement politiques, et non sur des compétences. "All honest people are eliminated by government leaders. That action is against the clear right of all citizens to be candidates for the job". Je dirais qu'au moins c'est clair, plutôt que l'hypocrisie et la mise en scène des concours ouverts aux masses (au cas où vous ne connaîtriez pas l'EPSO, la pépinière de fonctionnaires européens..). Il en va de même pour des responsabilités politiques (pas exécutives), le plus souvent royalement payées pour un travail qui ne saurait être ni défini, ni quantifiable, ni productif. 

L'autre domaine, celui qui conçoit son travail dans l'ombre, s'est mis en quête de respectabilité et donc, de légalité. Les groupes du crime organisé ont évolué: ils sont plus réduits, plus transnationaux, et les montants sont plus importants. Rien que ces sept pays européens (France, Italie, Espagne, Irlande, Grande Bretagne, Finlande, Pays-Bas) génèrent environ 40 milliards par an résultant du trafic de drogue, de la contrefaçon, et de l'exploitation sexuelle. La nouveauté, c'est qu'ils infiltrent le monde du business légal, en polluant ainsi l'économie légale. Ils ne mettent pas leur argent dans les technologies, puisqu'ils n'ont pas le savoir faire, mais dans le bâtiment, les bars et les restaurants, l'immobilier, le textile.
 
L'article m'est revenu en mémoire il y a deux jours, lorsque j'ai vu dans Nice l'affiche du spectacle  organisé par un groupe de manele (cette musique spécifique, née dans les quartiers de Bucarest après '90 -lire davantage dans Wikipedia). Pour les réservations, on indiquait un restaurant roumain, telle rue, tel numéro. Comme ce n'était pas loin, j'y suis passée, histoire de me faire une idée. Enfin, l'idée, je l'avais déjà, puisque à Nice, j'avais remarqué, au fil des années, quelques restaurants roumains, qui avaient d'ailleurs fermé pas longtemps après avoir ouvert. Sur les photos exposées à l'extérieur, des plats disons traditionnels (mais les Grecs et les Turcs pourraient les revendiquer aussi), pas plus de dix tables, local bien situé et équipé. Sur le net, les infos basiques: société déclarée depuis quelques mois, jeune gérante, capital symbolique. Les restaurants traditionnels roumains à l'étranger, je connais un peu, et je garde surtout le souvenir d'une expérience directe. La voici, à titre d'anecdote.
Il y a quelques années, je m'étais donné assez de mal pour organiser le mariage religieux de mon fils et le baptême de la petite aux Etats-Unis, formule 2 en 1, à savoir en un seul événement. J'avais failli y renoncer à cause des critères à remplir, et que je trouvais d'un compliqué pas possible, mais j'avais promis à ma mère. Alors, je l'ai fait dans les règles. La paroisse roumaine se trouvait dans un autre Etat, à quelques heures de route, et c'est le prêtre (je me suis demandé s'il avait le grade de lieutenant..) qui nous avait mis en relation avec le patron d'un restaurant roumain situé à la sortie de la grande ville, à encore une demi-heure de route. Bien entendu, on avait opté pour le menu traditionnel, il n'y avait pas trente-six, les feuilles de choux farcies et la polenta, les petites saucisses..Il faut dire que la cuisine roumaine, sans être le comble du raffinement, est pourtant succulente, et qu'elle n'a pas que ces trois plats-là.. Le restaurant était énorme et vide, nous étions une vingtaine. Je n'oublierai jamais ce repas cuisiné par des gens qui devaient être tout, sauf des professionnels, en tout cas, ils n'avaient rien à voir avec la restauration. Des plats immangeables, et sans parler du service.. Nous, on avait compris, mais j'ai eu honte devant les invités américains. On avait laissé les assiettes presque pleines, et on avait commandé des grillades, simplement..