Cet esprit américain.. (20/04/2015)

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(Mes photos: au Forum Ecobiz, Nice)

 

Non, je ne suis pas contre le TTIP  -le Traité de libre échange transatlantique censé favoriser les exportations européennes, relancer l'économie, créer de l'emploi, en supprimant certains droits de douane et en facilitant les règlements administratifs. L'incapacité de l'UE à gérer le problème de la migration mise à part, j'essaye d'être confiante dans les négociations avec les US. Oui, c'est honteux de ne pas trouver une solution digne de notre époque pour le drame qui se joue chaque jour en Méditerranée. Quant au TTIP, il vient de mobiliser contre lui des milliers de personnes plus ou moins informées de quoi ça parle (les marches du samedi dernier en France, Allemagne, etc). La pression de la société civile organisée dans des associations diverses me fait le même effet que sa quasi inexistence en Europe de l'Est. Il doit y avoir quelque chose dans les forces alter qui finit par ressembler, inévitablement, à des enjeux de pouvoir, et ça revient au même..

 

Personne ne saurait nier le dynamisme et l'optimisme du business américain. Et aussi sa cohérence, en quelque sorte, là où l'UE semble plutôt hésitante: par exemple, elle sanctionne Google pour abus de position dominante dans la recherche en ligne, tout comme - même raison- elle n'avait pas donné son accord pour que UPS rachète la compagnie de logistique TNT, mais elle va accepter apparemment une offre de quelques milliards de moins de la part de FedEx.. Disons que ce qui est difficile et paraît insurmontable dans l'UE, ce sont les intérêts nationaux divergents des 28 (d'où l'agressivité des lobbys), l'absence d'une stratégie politique réelle commune, et un appareil bureaucratique énorme, qui n'ayant pas la possibilité de réfléchir, se limite à apporter des réponses automatiquement tracées. Peut-être communique-t-elle mieux qu'il y a dix ans, sur Internet et sur les réseaux sociaux (grâce à de plus grosses équipes en charge de la communication, car des fonds, il y en a), mais ça, c'est le propre du siècle, les islamistes aussi communiquent.. 

Le dynamisme américain, lui, a des résultats. Il y a quelques jours, tous les journaux en ligne avaient repris et traduit en moins de deux heures "le cas" de ce jeune patron qui, après avoir lu un ouvrage sur le bonheur, avait décidé de baisser son salaire et d'augmenter le salaire minimum de ses employés à 7000 $ par mois. Des ouvrages de ce genre sont nombreux aux Etats-Unis, la psychologie positive nous explique très bien la relation, sur l'échelle des valeurs, entre notre bonheur ou notre bien-être et l'argent. Avec le retard de rigueur, Seligman a été traduit et a paru aussi en France (j'en ai fait des copies pour les participants à mon cours sur les compétences émotionnelles, histoire de le transmettre plus loin, en Europe..). Un article dans The New Yorker observe comment l'Amérique des corporations sait intégrer la méditation (plus exactement, ce que l'on appelle la pleine conscience - the mindfulness). Aetna, General Mills, Goldman Sachs offrent des espaces en libre-service pour que les employés puissent pratiquer la méditation. Vous me direz que ce n'est pas nouveau, et que dans les aéroports aussi on voit des espaces aménagés où l'on peut se recueillir dans sa religion (à Bucarest, dans la salle d'attente de l'aéroport Henri Coanda, il existe une petite chapelle orthodoxe - le gouvernement n'est pas encore arrivé au degré d'ouverture qui reconnaît d'autres confessions). Sauf que la méditation dont on parle n'a rien à voir avec la religion. D'une technique destinée à faire comprendre aux moines la non-réalité de l'ego, elle est devenue l'inspiration pour un nouvel outil d'aide à la gestion de soi, et maintenant un outil du business. Comme dit Rick Hanson :"la méditation pleine conscience n'est pas un état mystique, mais une capacité psychologique quotidienne", et en citant un maître inconnu: "même les enfants, les ivrognes, les fous, les vieux, ou les illettrés peuvent développer la pleine conscience". L'idée c'est de développer davantage de calme et d'attention, d'être plus concentré, plus attentif, donc plus productif. 

La méditation est en train d'acquérir un statut culte dans le monde du business américain. Néanmoins, malgré ses bénéfices potentiels, certains se demandent si les managers ne deviendront pas trop doux et trop compatissants (pourront-ils embrasser la méditation bouddhiste et continuer à licencier?). Il faut garder l'espoir que la culture de la pleine conscience restera focalisée sur "l'optimisation de la performance au travail", de sorte que les gens puissent accéder "au bonheur authentique et à la réalisation de soi". Il me semble qu'un fil rouge part de Maslow - pour qui la réalisation de soi est accessible à tous, à l'inverse de Freud, pour qui la réalisation de soi ne se pose même pas -, et qu'il est toujours présent dans le type de démocratie américaine selon laquelle tout le monde peut avoir sa chance et s'épanouir. Les adaptations des pratiques bouddhistes et hindouistes par les businessmen américains datent depuis plus d'un siècle, elles débutent avec le mouvement New Thought au XIXe, se poursuivent avec le New Age et la littérature de motivation. La foi dans le pouvoir de l'esprit à modeler la réalité physique a eu un profond effet sur la culture américaine. La pleine conscience, telle qu'elle est connue aujourd'hui, est née de la rencontre entre les maîtres asiatiques modernes et pragmatiques qui essayaient de rendre le bouddhisme et l'hindouisme accessible au monde occidental, et l'Occident qui les a fait entrer dans son moule psychologique spécifique (la méthode Mindfulness Based Stress Reduction de Jon Kabat-Zinn). Dans son ouvrage "A Republic of Mind and Spirit", Catherine Albanese écrit que "avec le business de la méditation, nous avons une technique qui a été extrapolée du bouddhisme et rendue laïque, de sorte que tous les arguments théologiques sont balayés"

 

J'ai écrit une note il y a 9 ans déjà, intitulée L'esprit américain. Je l'ai relue, et je suis toujours parfaitement d'accord, mieux encore: rassurée, la conscience tranquille. Claudiu est arrivé à une position de jeune manager dans la compagnie nationale où il est entré en 2007, et il est en même temps un DJ passionné, et un arbitre de soccer..Samedi dernier, il a participé à une compétition aux obstacles dans la boue (il l'a dédiée à la mémoire de sa grand-mère..). Maintenant, il m'est impossible de l'imaginer évoluer comme cela en France, pour ne pas parler de son pays d'origine, la Roumanie.. Jeudi dernier, le 16 avril, je suis allée au 7e Forum Ecobiz en tant que CEFRO, et parmi les programmes, j'ai choisi celui qui se déroulait sur le site de la CCI, en ville. Il y avait du Speed Business Meeting, et une conférence qui m'intéressait, sur les négociations complexes, donnée par un monsieur diplômé en droit, diplômé de l'Ecole Nationale de police et de la National Academy du FBI, ancien officier négociateur au RAID. Très intéressant et agréable, comme intervention, en plus, la première fois que j'entendais dans cet endroit des références bibliographiques qui m'étaient si familières..La question n'était pas de participer au Speed Business Meeting (j'ai considéré que j'avais dépassé cette phase, et que cela ne valait pas la peine de dépenser le peu d'énergie précieuse qui me reste, en présentant CEFRO en 1 minute devant un groupe de dix personnes, et leur distribuer ensuite ma carte -en plus, pour les trois groupes de dix, il me fallait donc à peu près 30 cartes de visite, et je ne les avais pas..). J'ai fait quelques photos pour la page Facebook de CEFRO, que j'ai publiées le jour-même, j'ai eu une activité, je suis encore en vie. Pendant que les groupes se formaient dans la cour, je suis allée me chercher un café à l'accueil, et là, la grosse machine Malongo refusait de fonctionner, elle affichait "tiroir plein". Je ne savais pas sur quoi appuyer et comment la faire démarrer, mais je tenais absolument à boire ce café, alors j'ai demandé aux deux messieurs qui étaient en pleine conversation, à côté de la machine. Ils n'ont pas réussi non plus, j'ai alors demandé à une jeune dame qui passait par là et qui l'a tout de suite débloquée. L'un des deux messieurs au badge "Maître ..." a remarqué que je n'avais pas pu démarrer la machine à café, mais que j'avais su mobiliser trois personnes pour le faire, et m'a demandé dans quel domaine je travaillais. Je lui ai dit que dans les compétences émotionnelles. Il ne savait pas ce que cela voulait dire, et m'a demandé une carte (sans me donner la sienne, il ne l'avait pas évidemment, on est dans le midi, il allait me l'envoyer par email..). C'est pour dire que finalement j'ai eu mon Speed Business Meeting. Parmi les bénéfices de la journée (à part la conférence et des photos pour la visibilité de Cefro), je pourrais compter cette remarque spontanée, qui sur le moment, m'avait réveillée, pour me rappeler ensuite que, depuis des années, je n'ai toujours pas réussi à mobiliser même une seule personne en faveur de mon projet. (Ou comme dit Monsieur le Préfet des Alpes-Maritimes, malgré mon parcours qui est apprécié, je n'ai pas réussi à m'insérer professionnellement..).  

 

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