11/03/2020
La Covid-19
(Mes photos- La première Super lune de l'année)
Il existe des moments quand le présent vous semble être en régression comparé à d’autres époques éclairées par des esprits brillants, trois ou quatre par siècle, pas plus. Parfois, cette évidence vous frappe, vous, spectateur et acteur à la fois, bien ancré dans le présent. C’est assez décourageant. L’Italie vient de décider la quarantaine pour ses 60 millions d’habitants. Rester chez soi, se déplacer en cas de nécessité. Ce sont les consignes à suivre. Tous les pays sont en train de prendre des mesures de sécurité sanitaire, mais les systèmes de santé sont différents. Les comportements civiques aussi. C’est le moment de prendre Pascal à la lettre : « Tout le malheur des hommes vient d’une seule chose, qui est de ne savoir pas demeurer en repos, dans une chambre »
Les Roumains quittent en hâte la péninsule (ils sont plus d’un million à y vivre, c’est la communauté la plus nombreuse), et ils retournent en Roumanie. Là, c’est connu, il n’existe pas de procédure prévue pour de tels moments, comme dans les pays occidentaux, et d’ailleurs, il n’existe pas de stratégie pour rien du tout, on fonctionne au jour le jour, depuis trente ans déjà. Heureusement, le pays est membre de l’UE, il copie sur les autres, il décrète les mêmes mesures que les autres. Sauf que le comportement des Roumains a du mal à s’y plier - ne pas respecter les règles, les contourner, s’arranger, se débrouiller, d’une façon ou d’une autre, c’est une manière de vivre. Un quotidien écrit que le nouveau sport national c’est d’arriver à tromper la police des frontières quant au lieu de départ: les gens déclarent donc venir de Grande Bretagne, d’Allemagne, en aucun cas d’Italie. Certains empruntent des trajets déviés, ils se rendent dans un pays voisin de l’Italie et de là ils prennent un vol à destination de la Roumanie. Il est vrai qu’en Italie les témoignages du personnel de santé dans les hôpitaux sont terribles, écrit « L’Obs » en ligne : « Nous devons choisir qui intuber, entre un patient de 40 ans et un de 60 ans qui risquent tous les deux de mourir. C’est atroce et nous en pleurons ».
Mais en Roumanie, qui ne dispose pas de moyens concrets suffisants pour faire face à une épidémie de proportions (quelles que soient les déclarations de circonstance des politiques), il y a un autre facteur aggravant : l’Eglise orthodoxe et ses déclarations décalées dans ce contexte, par exemple à propos de l’Eucharistie (les fidèles utilisent tous la même petite cuillère) et du rituel consistant à embrasser les icônes. « Nous, dans notre orthodoxie, nous ne négocions pas la préparation et célébration des fêtes pascales. » Et les intellectuels de la nouvelle vague, diplomates après ’89 et possesseurs de doctorats (en France !), y rajoutent des arguments un peu plus fins: « L’Eucharistie est une dimension spirituelle, qui doit être respectée par ceux qui l’assument. La distance entre l’espace sacré et l’espace profane ne saurait être abolie, car rien n’aurait plus de sens dans la vie spirituelle. Le croyant est simplement protégé quand il communie, ou quand il embrasse les icônes, c’est au-delà du rationnel, c’est supra-rationnel » (sic!) (Radio Europa libera en ligne). Le porte-parole de l’Eglise orthodoxe dit que celle-ci n’entrera pas en quarantaine, « car elle appartient au Christ, et non à une autorité séculière », « vous ne pouvez pas transformer l’Eucharistie en un élément pathogène, c’est un blasphème de point de vue spirituel, et une ineptie intellectuelle ». Voilà. Allez leur dire que le blasphème est un crime imaginaire…
Faisons un bond de plus de 350 ans en arrière, chez le Philosophe, afin de nous ressourcer, en feuilletant le livre de Frédéric Lenoir, excellent pour la circonstance. Selon Spinoza, les religions doivent être tolérées mais soumises à la puissance publique.
« Les pratiques ferventes et religieuses devront se mettre en accord avec l’intérêt public, autrement dit si certaines de leurs expressions sont susceptibles de nuire au bien commun, il faudra les interdire. » « Je déclare l’homme d’autant plus en possession d’une pleine liberté qu’il se laisse guider par la raison. » (Traité théologico-politique, 1670). Un siècle avant Voltaire et Kant, Spinoza est le premier théoricien de la séparation des pouvoirs politique et religieux et le premier penseur moderne de nos démocraties libérales. Spinoza n’est pas athée, bien sûr, mais il ne croit pas au Dieu révélé de la Bible. Pour lui, Dieu est un Etre infini, véritable principe de raison, de sagesse philosophique. Il propose un dépassement de toutes les religions par la sagesse philosophique qui conduit à l’amour intellectuel de Dieu, source de Joie et de Béatitude. Pour Spinoza, la religion correspond à un stade infantile de l’humanité. Il souhaiterait que les lumières de la raison permettent aux humains de découvrir Dieu et ses lois sans le secours de la loi religieuse et de tous les dogmes qui l’accompagnent, qu’il considère comme des représentations puériles, sources de tous les abus de pouvoir possibles.
La conception spinoziste de Dieu est totalement immanente : il n’y a pas un Dieu antérieur et extérieur au monde, qui a créé le monde (vision transcendante), mais de toute éternité, tout est en Dieu et Dieu est en tout à travers des attributs qui génèrent une infinité de modes singuliers, d’êtres, de choses, d’idées. Deus sive Natura. L’éthique immanente du bon et du mauvais remplace ainsi la morale transcendante et irrationnelle du bien et du mal. La Joie parfaite, la Béatitude, est le fruit d’une connaissance à la fois rationnelle et intuitive qui s’épanouit dans un amour universel, fruit de l’esprit, un amour intellectuel de Dieu. Il y a trois genres de connaissances : l’opinion et l’imagination, qui nous maintiennent dans la servitude, la raison, qui nous permet de nous connaître et d’ordonner nos affects, et un troisième, en prolongement du deuxième, l’intuition, par laquelle nous arrivons à l’adéquation entre notre monde intérieur et le cosmos entier. « Plus on est capable de ce genre de connaissance, plus on est conscient de soi-même et de Dieu, c’est-à-dire plus on est parfait et heureux » (Ethique). Donc, union à un Dieu immanent par la raison et l’intuition. « L’homme vertueux n’est plus celui qui obéit à la loi morale et religieuse, mais celui qui discerne ce qui augmente sa puissance d’agir ». Et c'est justement la libération de la servitude qui augmente notre puissance d’agir et notre joie. Plus nos sentiments et nos émotions seront réglés par la raison, plus nos passions seront transformées en actions, plus grande sera la part de notre esprit qui subsistera à la destruction du corps. La liberté s’oppose à la contrainte, mais non à la nécessité. On est d’autant plus libres qu’on est moins contraints par les causes extérieures et qu’on comprend la nécessité des lois de la Nature qui nous déterminent.
09:06 Publié dans Actualités, Enjeux, Evénement, information, Livre, Presse, RO-EU-USA/Coopération, Science, Voyage, Web | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : coronavirus, sécurité sanitaire, église, philosophie | Facebook | | Imprimer
20/03/2013
De l'éthique
Update 31. Joyeuses Pâques! Happy Easter! Le 5 mai, je re-fêterai Pâques avec le monde oriental.
Premier jour du printemps astronomique, mais il pleut et il fait frais (même sur la Côte d'Azur). Je me plonge dans une lecture plutôt adéquate, la Conférence sur l'éthique que Wittgenstein avait présentée devant un public de non-philosophes. Selon lui, l'éthique se pense toujours dans un contexte et dans des pratiques déterminées, elle ne saurait être une théorie, mais aurait un caractère intrinsèquement personnel. L'analyse détaillée des aspects physiques et psychologiques de nos actions ne nous révélera jamais ce qui les lie à l'éthique, mais c'est notre attitude vis-à-vis de ces actions qui les rend éthiques, plus exactement la manière dont nous arrivons à nous extraire des faits pour les contempler comme d'un point de vue extérieur. Il dit, par exemple, que lorsque quelqu'un face à une décision importante se demande "Que dois-je faire?", le sérieux de cette question est "éthique" parce qu'il se distingue d'autres types de choix. Donc, l'éthique est dans l'attitude du sujet qui expérimente et qui éprouve. Le monde de l'homme heureux n'est pas le même que le monde de l'homme malheureux, bien que les faits qui le constituent soient identiques, c'est le regard qui change, la volonté à l'égard de ce monde qui est différente, mais pas le monde lui-même. En voulant exprimer l'inexprimable (tout comme la religion ou l'esthétique), l'éthique se confronte aux limites du langage, elle ne peut pas s'énoncer sous la forme de propositions douées de sens, mais elle peut se montrer à travers des expériences qui la révèlent dans son authenticité.
Encore une fois, c'est une histoire de sujet (je dirais de sujet singulier). Bon, nous avons quelques normes, quand même.. La lecture de Wittgenstein vient de me procurer la bonne humeur dont j'avais besoin. Surtout que lui, il ne méprise pas cette littérature "mineure" (les polars), où il dit trouver des exemples d'expériences éthiques souvent plus profondes que celles présentes dans les ouvrages de philosophie. D'ailleurs, c'est bien le dernier polar intelligent que je viens de finir, qui m'a fait faire un détour du côté de chez Wittgenstein...Pure coïncidence avec les derniers événements économico-politiques (soit Chypre, paradis fiscaux, Suisse, affaires, ministres, etc.).
P-S. Je n'ai vu qu'un quart d'heure du documentaire diffusé sur France3, DSK, l'homme qui voulait tout, réalisé par un psychanalyste très médiatique, dont l'intention affirmée était de proposer un regard freudien. Pour moi, un regard freudien signifie quelque chose d'implacable et de sentencieux, et qui rend triste, invariablement. Donc, je ne m'attendais pas que le documentaire soit joyeux, en plus, la démarche allait subtilement dans le sens d'une justification finalement logique (et que j'ai trouvée assez politique). C'est toujours Wittgenstein qui écrit, à une époque où il n'admirait plus la psychanalyse, que "les pseudo-explications fantastiques de Freud (justement parce qu'elles sont pleines d'esprit) ont rendu un mauvais service, n'importe quel âne disposant maintenant de ces images freudiennes pour "expliquer" avec leur aide des symptômes pathologiques" (dans Remarques mêlées).
P.P-S. Dans la colonne de gauche, on peut utiliser la rubrique Rechercher pour tomber sur des notes bien antérieures, en tapant des mots-clés (je l'ai fait avec "States", "entreprendre", corruption", fonds"). Il faudra peut-être relier certaines notes au site de Cefro, et donc refaire ce site-là qui ne correspond plus vraiment (je suis en train de voir cela). Parce que, inutile de le dire, je m'accroche à CEFRO (qui aurait besoin d'un contrat, d'une collaboration, d'un projet retenu, d'une subvention). Bien sûr, je pourrais tout laisser tomber, mais impossible, ma petite vie ne l'entend pas de cette oreille.. Elle est au stade éthique, sans jamais être passée par le stade esthétique. Alors, même si j'agis toujours, j'attends Godot..
23:08 Publié dans Actualités, Enjeux, Evénement, information, Jeux, Livre, Presse, RO-EU-USA/Coopération, Science, Web | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : éthique, wittgenstein, littérature, philosophie, politique, affaires, freudien | Facebook | | Imprimer
07/02/2013
Knowledge economy
Despite some criticism brought to materials written on Emotional Intelligence, the popularity and support this subject has had among business management in the United States and other parts of the world during the past 15 years proves it can successfully be applied in the workplace.
Through training sessions offered by CEFRO during the past years, I have engaged European participants sponsored by the Grundtvig program in courses designed to encourage developing Emotional Intelligence in the workplace.
These very well received courses gave me the opportunity to look deeper and reflect upon the principles guiding, inspiring and driving our actions as well as the path we choose for our lives and our careers. I found it interesting to look at this subject from an ethical perspective, the only one capable of bringing long-term solutions.
At a time when “life-coaching” has proved to be limited in forming personalities, I believe the quality of goals and actions is capable of justifying and bringing happiness to a positive existence. In a recent discussion, a friend argued she did not know anyone around her who makes happiness a goal to strive for, and there surely would be other values one would seek in their lives. Certainly, religion and psychoanalysis approaches are different from philosophy; however it is the latter which can truly provide tools for an independent thought process.
Therefore, I updated my Lifelong Learning project to include the idea of training in Emotional Intelligence from a philosophical and positive psychology perspective (see description in “Liste Cefro” on the right column -CEFRO Professional Services).
12:12 Publié dans Actualités, Emploi, Enjeux, information, Livre, Musique, RO-EU-USA/Coopération, Science, Voyage, Web | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : philosophie, psychologie positive, lifelong learning, éthique, projet cefro | Facebook | | Imprimer