Réflexions pour un week-end (de Pâques) (05/04/2010)

Il y a des jours où vous vous souvenez que vous devriez être meilleurs, plus généreux, plus ouverts, plus chaleureux. Il y a des circonstances qui vous obligent à poser à nouveau un regard sur votre vie, sur ses étapes, et à faire une comptabilité simple: ce que j'ai perdu (mais puisque c'est perdu, comment le savoir? dirait le sage), ce que j'ai gagné.
Samedi soir je suis allée prendre la lumière à l'église grecque de Nice, comme chaque année (la paroisse orthodoxe de la communauté roumaine étant si loin, que même si je voulais y aller, il me serait difficile sans voiture, ce qui me donne, d'ailleurs, une bonne raison..).
Le grand cierge blanc, entouré d'une petite protection contre le vent, ne s'est pas éteint sur tout le chemin de retour à la maison. J'ai donc traversé le Centre ville jusqu'à mon quartier multiculturel (cosmopolite, si vous préférez) le cierge allumé à la main, sans encombre (je précise), et je suis rentrée dans l'appartement avec la lumière (un bon signe, selon la tradition..).
Le lendemain, j'ai passé et j'ai reçu plusieurs coups de fil pour les voeux habituels. L'un d'entre eux, c'était à ma tante qui habite une petite ville roumaine de province, cette tante-là qui est convaincue que je manque de diplomatie dans mes attitudes critiques.. En principe, je devais aller en Roumanie à Pâques, au moins pour fleurir moi-même la tombe de mes parents, et pour commémorer les trois ans du décès de maman, mais j'ai finalement renoncé à ce voyage, en faisant le nécessaire pour que l'événement se déroule dans les règles, grâce aux proches sur place. D'abord, parce que après les deux cours de Février, je n'ai plus eu aucune envie, brusquement, de me retrouver en Roumanie...Ensuite, parce que les trois cents euros de billet d'avion trouveront une meilleure utilisation cet été, lorsque la petite famille roumano-américaine viendra passer deux semaines de vacances en Europe (c'est-à-dire à Nice), deux semaines "arrachées" à leurs compagnies respectives...C'est mon projet de l'année, et comme toujours, je ne vois pas au-delà de cette limite, il faut s'efforcer de vivre au présent, quand il est impossible de se projeter plus loin..
Donc, dans la conversation avec ma tante, j'ai eu l'occasion de m'entendre dire, au passage, que j'avais fait des erreurs, que je n'avais pas réussi en France, que normalement en Roumanie je serais arrivée à une bonne position à l'Université de Bucarest, à l'Académie...
Je lui ai fait observer posément que je n'avais jamais affirmé que je vivais bien en France (tout en habitant dans une région qui fait des jaloux), que je survivais depuis dix-huit ans et que probablement ça allait continuer, mais qu'en Roumanie, telle que je suis, j'aurais réussi encore moins..
Heureusement, ce genre de remarques a cessé de m'affecter depuis longtemps, d'autant plus que la réalité, elle, n'a cessé de me confirmer que mes choix étaient les seuls possibles. Je ne les regrette nullement.
Mais cette conversation m'a fait voir deux aspects, l'un d'ordre particulier, l'autre plus général. Le premier, c'est le côté nationaliste des Roumains, et dont personnellement j'ai horreur, et qui, dans le fond, ne serait qu'un sentiment d'infériorité déguisé, explicable par l'histoire..Mais ce côté-là les empêchera toujours de dire non à la pourriture, quelle que soit sa forme, au lieu de s'en accommoder avec plus ou moins de cynisme. Et en définitive, personne n'est plus autorisé qu'eux à dire et à faire ce qu'il faut dans leur propre pays. 
Le second, c'est à propos d'une certaine forme de vieillissement: les gens vieillissent mal, tristement, ils ne changent pas en mieux, au contraire, ils se rigidifient dans leurs traits de caractères les moins agréables. Et réussir sa vie a très peu à voir avec se réussir soi-même, après tout.
 
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