Et si le Mur n'était pas tombé?/Les autres (27/07/2009)
Eh bien, on n'aurait pas contemplé de près le mythe de la démocratie occidentale, dont on rêvait de loin, et on n'aurait pas compris qu'il n'était pas meilleur, mais juste autrement agencé, on ne serait pas entrés en Europe officiellement, on n'aurait pas franchi des frontières, on n'aurait pas connu la xénophobie..
Dans une récente conversation, on m'a répliqué que tous les pays étaient xénophobes. Non pas politiquement, ouvertement, cela va de soi (lois, droits, directives, associations, ONGs, etc.), mais en profondeur, en sourdine, les étrangers n'étant ni aimés, ni véritablement intégrés ou reconnus, mais tolérés. Pour ma part, je le confirme. Un écrivain roumain émigré aux States dans les années '80 dit, après avoir pris connaissance de son impressionnant dossier à la Securitate, que "le sentiment d'être un étranger parmi les siens est un peu plus terrible que le sentiment d'être un étranger parmi d'autres". C'est pourquoi je pense que l'approche philosophique/psychanalytique de l'Autre (mon semblable, tout court) serait plus recommandable, car plus consolatrice. La révolte se trouverait apaisée par les limites mêmes de la condition humaine, puisque les considérations politiques peuvent se valoir toutes, à un moment donné.
"L'une de mes constantes préoccupations est de comprendre comment d'autres gens peuvent exister, comment il peut y avoir des âmes autres que la mienne, des consciences étrangères à la mienne, laquelle, étant elle-même conscience, me semble par là même être la seule. Je conçois que l'homme qui se trouve devant moi, qui me parle avec des mots identiques aux miens, et qui fait des gestes semblables à ceux que je fais ou je pourrais faire -je conçois qu'il puisse, en quelque façon, être mon semblable. (...).Personne, me semble-t-il, n'admet l'existence réelle des autres.(...). Il est des figures des temps passés, des images-esprits contenues dans les livres, qui sont pour nous plus réelles que ces indifférences incarnées qui nous parlent par-dessus le comptoir, ou nous regardent par hasard dans le tram, ou qui nous frôlent en passant, au hasard mort des rues. Ces autres-là ne sont pour nous que paysage, et presque toujours paysage invisible, de rue trop bien connue. (..) Je n'ai pas honte d'envisager les choses de cette façon, car je me suis aperçu que tout le monde en fait autant. Ce qui peut sembler du mépris pour l'homme, de l'indifférence permettant de tuer des gens sans bien sentir qu'on les tue, comme chez les assasins, ou sans penser que l'on tue, comme chez les soldats, provient de ce que personne n'accorde l'attention nécessaire au fait -sans doute trop abscons- que les autres sont des âmes, eux aussi." ( Fernando Pessoa/Bernardo Soares, Le livre de l'intranquillité).
Update: le 31 Juillet (1990/2009) Chanson fétiche, elle m'a accompagnée, en version roumaine, dans mon premier séjour en France, je la fredonnais constamment.. "Marina, Marina, Marina/O mie de ani de-as trai/Marina, Marina, Marina/Aleasa pe viata sa-mi fii/Crede-ma, Marina, /Lumea asta-i mare/Dar tu n-ai asemanare/O, nu, nu, nu, nu, nu". (Marina, Marina, Marina/Même si je vivais mille ans/Tu serais mon élue à vie/Crois-moi, Marina/Ce monde est grand/Mais tu n'as pas d'égale/O, non, non, non, non, non).
Rocco Granata - Marina 2001
Released 1959
Released 1959
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