LETTRE OUVERTE (14/12/2004)

Lettre diffusée par e-mail aux instances internationales et aux médias, le 14/12/04

Lettre ouverte à Monsieur Traian BASESCU
PRESIDENT de la ROUMANIE
Bucarest


Monsieur le Président,


Permettez-moi de vous adresser, en tant que citoyenne roumaine, mes félicitations pour votre élection dans cette haute fonction.
J'ai voté en France, au Consulat de Marseille, et je vous ai accordé mon vote principalement pour des raisons d'alternance dans le changement que traverse la Roumanie depuis quinze ans.
Dans l'une de vos premières déclarations qui ont été diffusées sur diverses chaînes, vous avez eu la franchise de préciser que la corruption d'Etat dans notre pays mettait en danger aujourd'hui la sécurité nationale elle-même.
Il est plus qu'évident que dans ces conditions, un raisonnement en noir et blanc est absurde, et que vous serez amené à composer avec une équipe, qui elle non plus, ne sera ni noire, ni blanche, mais toujours nuancée. On est en Roumanie, "aux portes de l'Orient", comme dit ce vieux cliché qui semble tout expliquer et tout excuser. Mais on est aussi aux portes de l'Europe, et votre engagement serait d'y entrer avec dignité, et non pas à genoux.

Cette corruption qui gangrène notre pays n'est pas une abstraction: elle est dans tout, elle affecte le tissu économique, les rapports professionnels et humains, elle influe directement ou indirectement sur l'avenir des Roumains, en tant qu'individus qui forment des projets de vie.
J'appartiens à la même génération que vous ou que votre contre-candidat, ou que l'ex-Ministre des Affaires Etrangères -autour de la cinquantaine, donc, une génération qui est à cheval sur deux étapes distinctes dans l'histoire contemporaine de notre pays, et qui partage les mêmes références du passé et les mêmes enjeux du futur.
La question essentielle est s'il vous sera possible de briser les mécanismes de l'éternel retour à un système basé sur le clientélisme et sur l'enrichissement personnel à tout prix, et de l'amoindrir au moins, car malheureusement, aucune démocratie dans le monde ne pourrait reconnaître l'avoir anéanti.

Ce sont les jeunes (nos enfants) qui ont à faire à présent l'expérience des formes de l'esclavage moderne, et ce phénomène est flagrant pour un pays adhérent aux grandes structures euro-atlantiques, comme le nôtre. Formés aux écoles de l'Occident, parfois suite à de grands sacrifices personnels, ces jeunes reviennent travailler en Roumanie et se retrouvent (sauf s'ils ont les relations indispensables au système) comme jadis sur des plantations de bambou. Ils ciblent des compagnies étrangères installées chez nous et se voient proposer des conditions humiliantes et des salaires quinze fois moins réduits que ceux pratiqués dans les pays occidentaux, pour des postes et des qualifications identiques. Et cela, lorsque le niveau de vie en Roumanie est en décalage énorme (par exemple, un loyer à Bucarest représente le montant du salaire proposé dans une telle compagnie étrangère). Alors, ils repartent renflouer la vague des immigrés hautement qualifiés, pour vivre l'esclavage moderne ailleurs, dans des contextes économiques disons plus maîtrisés.
Nous sommes conscients qu'il n'existe que ces deux possibilités en Roumanie: le système mafieux des relations, ou le départ.

Personnellement, j'ai l'expérience de cet esclavage moderne en sens inverse, en France où je ne suis que résidente étrangère, beaucoup de positions correspondant à ma qualification (parachevée, par ailleurs, en France) me sont inaccessibles. Je sais trop bien ce que troquer un enfer pour un autre veut dire, et j'ai énormément de peine pour ceux qui y sont contraints. Mon fils aussi, diplômé d'une Grande Ecole en France et d'une Université américaine se voit obligé de choisir la seule solution valable et de retourner pour un emploi aux Etats-Unis. Ses collègues en Roumanie ne vont pas mieux, mais ils se débrouillent, plus ou moins.
Or, c'est bien cette "débrouillardise" spécifiquement roumaine qu'il faudrait bannir, car le terme signifie que quelque chose n'est pas à sa juste place et qu'il faut toujours contourner pour réussir.

Comme mes propres efforts liés à la réalisation d'un projet de Centre de formation entre la France et la Roumanie sont également bien connus par le gouvernement sortant (Monsieur l'ex-Ministre des Affaires Etrangères M.Geoana), j'attends de connaître la composition du nouveau gouvernement, avant de relancer ma requête de soutien. Comme toujours, avec l'espoir que les choses pourront, enfin bouger concrètement.

En vous souhaitant beaucoup de succès dans votre travail pour la Roumanie,
Je vous prie d'agréer, Monsieur le Président, l'_expression de mon entière considération.

Carmen Lopez
7, av.Thiers, appt.406
06000 Nice France
tél(...)
et
10, Melodiei, appt.3
Galati 6200 Roumanie

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serghie_carmen@yahoo.com

Carmen Lopez
Managing Director SC TORR SRL J17/673/93 Galati Romania

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