"Comment l'Amérique a sauvé l'Allemagne de la famine et du socialisme"
15/09/2019
Ceci est l’adaptation d'un article roumain paru le 11 septembre 2016 et republié dans In linie dreapta, lors de la commémoration du 18e anniversaire des attentats de 2001. Clair et et factuel, et il a le mérite de rappeler des faits historiques non interprétables, dans un contexte actuel assez confus.
"La haine que nous voyons se manifester chez nous à l'égard des États-Unis semble mineure comparée à celle que nous pouvons trouver sur les sites des publications allemandes. Il n'existe pratiquement pas un article sur l'OTAN ou sur les États-Unis, même en ce jour du 11 septembre, sans les centaines de réactions sarcastiques de la part d'utilisateurs ayant des noms allemands.
L'article qui suit raconte comment l'Amérique a sauvé l'Allemagne de la famine et du socialisme, après avoir sauvé d'abord l'Europe du nazisme.
La division de l’Allemagne et de Berlin
A la fin de la Seconde Guerre mondiale, l’Allemagne a été divisée en quatre zones d’occupation par les puissances victorieuses : l’Union soviétique, les Etats-Unis, la Grande Bretagne et la France. La zone allemande occupée par l’URSS - l’Est de l’Allemagne - est devenue ultérieurement la République démocratique allemande (RDA), pendant que le reste du territoire, l’Ouest, a formé la République fédérale d’Allemagne (RFA). La ville de Berlin a eu un statut spécial. Elle se situait dans la prochaine RDA, mais a été, à son tour, divisée en quatre secteurs administrés par les quatre puissances. Autrement dit, au milieu de la zone communiste s’est formée l’exclave de la RFA, à savoir Berlin-Ouest. Dans la région de l’Ouest, la priorité des Etats-Unis a été la dénazification, tandis qu’à l’Est les Soviétiques s’occupaient de la communisation.
La situation économique de l’Allemagne
Après la capitulation, l’Allemagne était, autant à l’Est qu’à l’Ouest, le territoire de la pauvreté désespérée. Les grandes compagnies qui s’étaient associées avec le régime d’Hitler venaient pratiquement de compromettre le capitalisme. Le commerce, dans sa plus grande partie, se déroulait sur le marché noir, le mark allemand était complètement dévalué, la principale monnaie d’échange étant les cigarettes Lucky Strike, celles que les Américains préféraient. L’Archevêque catholique de Köln transmettait à ses fidèles qu’il était normal de voler de la nourriture et du charbon afin de survivre. Le maire de Köln, le futur chancelier Konrad Adenauer (qui écrivait qu’il devait sa vie à l’intervention américaine), dormait en manteau parce qu’il n’avait pas de quoi se chauffer en plein hiver. On estime que les repas de la population ne dépassaient pas 800-1300 calories par jour. Il y avait donc toutes les prémisses que l’Allemagne se transforme en un pays socialiste. Le parti social-démocrate, de loin le plus populaire par son opposition ferme au régime d’Hitler, souhaitait la nationalisation et la planification centralisée. A son tour, le Parti chrétien-démocrate, de droite, avait émis un document dans lequel il déclarait l’échec du système capitaliste.
Au seuil de la catastrophe humanitaire, le général américain Lucius Clay, le chef de l’occupation américaine, écrivait dans un télégramme adressé à Washington : « Je n’ai pas besoin de lire dans le New York Times que les Allemands meurent de faim. La Crise est maintenant ! »
L’aide américaine et le blocus de Berlin
En 1948, le Congrès des Etats-Unis approuve le Programme de rétablissement européen, ou le Plan Marshall. Pendant les quatre années qui allaient suivre, les Etats-Unis offrent à l’Europe plus de 12 milliards de dollars (estimés aujourd'hui à dix fois plus). A peu près 13 milliards de dollars actuels (11% de cette somme) ont été utilisés à la reconstruction de l’Allemagne de l’Ouest. L’URSS a refusé un plan similaire pour elle-même et pour les Etats qui se trouvaient dans sa sphère d’influence, dont l’Allemagne de l’Est. Mécontents que les changements à l’Ouest, dont une réforme monétaire, se faisaient sans leur accord, les Soviétiques ont bloqué, le 24 juin 1948, toutes les routes, les chemins de fer et les voies fluviales qui liaient Berlin à l’Allemagne de l’Ouest. Cette nuit-là, ils ont coupé le courant électrique aux Berlinois habitant les secteurs des alliés occidentaux. Non moins de 2,2 millions de personnes dépendaient des transports de l’Ouest. Il n’existait aucun accord d’accès terrestre ou maritime entre les Soviétiques et les Occidentaux, à part un accord aérien concernant trois couloirs, de 32 km chacun.
Trois variantes d’action ont été prises en compte: 1) abandonner Berlin-Ouest aux mains des Soviétiques; 2) pénétrer le blocus soviétique avec des chars d’assaut (cette solution avait été proposée par le général Clay mais elle a été refusée par le président Truman qui ne voulait pas prendre le risque d’un nouvel embrasement au milieu de l’Europe); 3) le ravitaillement de Berlin-Ouest par des avions sur les couloirs aériens exclusivement
Cette dernière idée semblait insensée : une population égale aujourd'hui à celle de Bucarest allait être ravitaillée, sur une période qui s’annonçait assez longue, avec tout ce qui était nécessaire à l’existence. Il fallait transporter de la nourriture mais aussi des matériaux de construction, car Berlin était ravagée après les bombardements, et aussi du charbon, pour produire de l’énergie.
Le pont aérien
C’est cette dernière variante qui a été retenue, malgré le fait qu’elle paraissait impossible. Le 26 juin, les Américains envoyaient déjà le premier vol du pont aérien (Luftbrücke). Quelques jours plus tard ont démarré les vols de ravitaillement dans lesquels se sont impliqués les Britanniques. Engagés dans la guerre d’Indochine, les Français n’ont pas participé à l’opération. Ultérieurement, d’autres pays aussi ont envoyé des avions : l’Australie, le Canada, la Nouvelle Zélande, l’Afrique du Sud.
Quelques chiffres et informations sur ce qu’a représenté le pont aérien
- Au début, on transportait 750 tonnes de marchandises et de matériaux par jour
- Un mois après le démarrage de l’action, on était arrivé à 2000 tonnes par jour
- Le sommet a été les 15-16 avril 1949 (donc l’année suivante), avec 12.850 tonnes transportées au cours de 1400 vols. Et tout cela en 24 heures.
- Ainsi que l’image montre [ici dans l’article d’origine], les avions utilisaient à l’aller deux couloirs et au retour le troisième, central.
- On était arrivé au rythme d’un avion qui atterrissait à Berlin toutes les trois minutes.
- Un avion était autorisé à essayer un seul atterrissage, s’il le ratait il devait retourner avec toute la marchandise en Allemagne de l’Ouest
- Si, au début, les avions stationnaient 75 minutes, vers la fin du blocus ils étaient arrivés à 30 minutes.
- Le blocus soviétique a été levé le 12 mai 1949, mais les vols de ravitaillement se sont poursuivis jusqu’au 22 août.
- Au total, il y a eu environ 280.000 vols, dont 190.000 américains.
- Les chicanes des Soviétiques n’ont pas manqué, soit dans l’air, avec des avions de chasse, soit au sol, avec des réflecteurs.
Il faut préciser que les Britanniques envoyaient des céréales qu’ils avaient reçues eux-mêmes de la part des Américains. Même si en Grande Bretagne les céréales étaient rationnées, ils envoyaient à Berlin-Ouest 33% de ce qui arrivait des Etats-Unis.
Les Allemands apprennent à l’école ce qu’a signifié l’aide des Etats-Unis après la Seconde guerre mondiale, et un certain nombre de monuments, à Berlin et dans d’autres villes, leur rappellent le pont aérien, la seule perfusion qui a maintenu en vie les Berlinois durant une année.
Et malgré cela, la plupart des Allemands évitent d’apprécier ou ils sont carrément hostiles envers les Etats-Unis, pendant que de plus en plus nombreux sont ceux qui manifestent de la tolérance envers la politique de Poutine."
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