Une tragédie roumaine
01/11/2015
( Photos -Chrysanthèmes sur mon bureau)
Quand on réfléchit aux multiples façons de mourir, on réalise que beaucoup d’entre elles pourraient être évitées: la mort volontaire que l’on inflige à autrui, sous diverses formes, la mort par inattention, par négligence, par sottise, ou par manque d’éthique élémentaire. Je ne parle pas de motivations irrationnelles, mais uniquement de faits et de comportements conscients, observables et explicables. Il est évident que, en règle générale et à ce jour, nous savons parfaitement ce qu’il ne faut pas faire si nous tenons à préserver la vie - la nôtre, celle d’autrui, celle de notre environnement, au sens plus large.
La tragédie qui s’est produite ce 30 octobre dans un club de rock à Bucarest soulève immédiatement des interrogations liées au fonctionnement de l’industrie du divertissement dans un pays qui a encore beaucoup à faire contre la corruption. Des clubs underground, des bars, des restaurants, des établissements dans des locaux inappropriés, ou qui ne sont pas aux normes, des autorisations de complaisance, ou absentes, des combines immobilières, des bénéfices par tous les moyens selon le principe: «un minimum d’investissement, un maximum de profit ». Il faut rappeler aussi que Bucarest est la ville européenne avec le plus grand nombre de casinos, et que, dans presque toutes les autres villes du pays, les salles de cinéma ont disparu pour laisser la place aux salles de jeux - le marché d’une certaine mafia, à laquelle on ne touche pas vraiment, parce qu'elle est liée à d’autres structures, celles-ci régulières. Il y a toujours des passerelles.
Comme à son habitude, la Roumanie réussit à adopter très vite les formes, sans trop s’inquiéter pour le fond. Rien n’a manqué après la tragédie: le plan rouge d’urgence (sur le modèle français, comme le précisait le secrétaire d’Etat au ministère de l’intérieur), la répartition des morts et des blessés dans plusieurs hôpitaux (le pays compte 425 hôpitaux et environ 18.300 églises, on ne construit pas d’hôpitaux, mais des églises et des cathédrales, à l’extérieur des frontières également, là où vit la diaspora -des dizaines de millions d’euros), le don de sang, les condoléances du président Iohannis, les trois jours de deuil national, et enfin, le déclenchement d’une enquête. On sait donc comment faire après, mais on ignore comment faire avant. Pourquoi ? Eh bien, parce que… Le groupe de hard-rock Goodbye to Gravity lançait dans cette veille d’Halloween son deuxième album dont une chanson intitulée "The day we die". A travers plusieurs sites et médias, la propagande religieuse (autre grand sujet..) ne tarde pas à capitaliser sur le malheur.
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