Amusant...?
08/04/2015
(Mes photos: mimosa derrière la grille)
Pour qu'une nation compte, il faut que la moyenne en soit bonne. Ce qu'on appelle "civilisation" ou simplement "société" n'est rien d'autre que la qualité excellente des médiocres qui la composent -écrivait Cioran. Nous pouvons faire un jeu-test, en calquant cette observation corrosive sur la civilisation de notre choix: ça fonctionne.
Ces derniers mois, une effervescente activité de la direction nationale anti corruption (DNA) a conduit à l'incarcération en chaîne d'un bon nombre de politiques et d'hommes d'affaires roumains. Chaque jour, une nouvelle victime fait les titres de la presse, on a presque du mal à suivre. Les révélations et les témoignages se bousculent et se chassent, la justice est décriée ou défendue, c'est selon..Avec un minimum de logique, on peut s'interroger sur ce qui a poussé tout d'un coup cette justice à (ré)agir, lorsque pendant des années, elle laissait des affaires fleurir et des personnages malhonnêtes grossir impunément. Eh bien, il semble qu'elle ait décidé de "voir" et d'appliquer la loi...Tiens.. Nous sommes libres d'être lucides et de chercher l'explication quelque part à l'extérieur..
Bon, finalement, ce serait le résultat qui compte. Mais, lorsqu'un processus est plutôt artificiel et démonstratif, il présente souvent des cacophonies, des aberrations, des aspects surréalistes.
Par exemple, conformément à une loi de 2006, un détenu peut voir sa peine de prison réduite s'il écrit en détention un ouvrage scientifique (et non un roman d'amour, un thriller, un recueil de poèmes). Dans d'autres pays, il n'est pas inhabituel qu'un détenu rédige un témoignage, et qu'il le fasse publier à la sortie pour dire sa vérité.. On sait bien qu'il est également possible de poursuivre des études ou une formation en prison. L'originalité de la législation roumaine consiste à exiger un contenu scientifique. Et cela donne ceci: un personnage publique, homme d'affaires semi-illettré de son état, prend quelques années de prison (la justice s'est décidée..). Il écrit 5 (cinq) ouvrages scientifiques, et sa peine est réduite de 200 jours. On découvre qu'il s'agit du plagiat d'une thèse publiée il y a dix ans sous la direction d'un professeur universitaire, à présent retraité. Par ailleurs, les livres scientifiques de l'ex-détenu sont introuvables, ils n'existent pas physiquement, ce qui compte c'est la mention "Bon pour impression". Pour avoir le droit d'écrire un ouvrage scientifique, le détenu doit joindre au dossier qu'il soumet à la direction de la prison la recommandation d'un professeur universitaire qui garantit qu'il est capable de mener une recherche sur le sujet. Donc, cela s'est fait dans les règles (car pour ce qui est de la forme, on sait faire..). Bien évidemment, le pénitencier n'a pas les compétences légales pour se prononcer sur le caractère scientifique des ouvrages élaborés par les détenus, et il renvoie donc au Conseil national pour la Recherche dans l'enseignement supérieur, lequel Conseil renvoie aux maisons d'éditions, les seules habilitées par leurs référents et experts...(Voir l'article ici).
Les commentaires sont fermés.